Histoires mauriciennes – 30 novembre 1942 : La Réunion libérée par des Mauriciens –  par Thierry Château 

Durant la première partie de la Seconde Guerre mondiale, La Réunion était aux mains des forces du Régime de Vichy. Le 30 novembre 1942, l’île est libérée par les Forces navales françaises libres. Parmi elles, un officier mauricien, le capitaine Hector Paturau. A la suite du débarquement effectué à partir d’un contre-torpilleur venu de Maurice, une courte bataille a lieu le 28 novembre, au Port. Elle est remportée par Paturau et ses compagnons.

Après la capitulation française en juin 1940, le personnel militaire de la colonie se limitait à environ 270 hommes, la plupart des miliciens, commandés par un douzaine d’officiers et sous-officiers. Le gouverneur de l’île, Pierre Aubert, avait décidé de demeurer fidèle au maréchal Pétain. Le président du Conseil général Raoul Nativel avait, pour sa part, dénoncé l’armistice à Radio Saint-Denis. Il fut démis de ses fonctions. Un mouvement local de résistance se mit en place.

En mars 1942, un commando de Britanniques et de Mauriciens, en provenance de Maurice, débarqua à La Réunion par la côte ouest, à Saint Gilles, pour livrer du matériel radio au mouvement de résistance. Au retour leur esquif sombra dans la passe de l’Hermitage. Deux membres du commando moururent noyés et les autres furent faits prisonniers par les gendarmes du Régime de Vichy.

Le 5 mai 1942, les Britanniques frappèrent à Madagascar, sous le contrôle de Vichy. Le général de Gaulle, qui n’avait pas participé à la libération de Madagascar, fut pressé de prendre le contrôle de La Réunion avant que les Britanniques ne le fassent. C’est ainsi que le représentant des Forces françaises libres à Maurice, le capitaine Paturau, reçut l’ordre de monter une opération pour  prendre La Réunion…

Dans la nuit du 26 au 27 novembre 1942, le contre-torpilleur Léopard quitta Maurice avec 74 hommes. Le navire arriva à Saint-Denis le 27 à 23 heures. 60 hommes débarquèrent et s’emparèrent du palais gouvernemental, sans coup férir. Au matin, Saint-Denis était sous le contrôle des forces libres.

Par contre, les troupes de Vichy retranchées au Port, offrirent une certaine résistance. Le 28 novembre, les cellules communistes de l’île tentèrent, sans succès, de s’emparer du Port, défendu par une batterie de 95 mm. Le Léopard prit une part décisive à la bataille. Sous le feu des défenses du Port, le navire riposta, tuant deux hommes. Le gouverneur Aubert abandonna alors l’idée d’une bataille qui pourrait s’avérer sanglante et accepta de se rendre. La reddition fut confirmée le 30 novembre à 8 h 45. La Réunion était libérée…

A Fréderic et Joyce – Régate et Festival culinaire de Mahebourg : Un grand moment !

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Comme chaque année la régate et le festival culinaire à Mahébourg aura tenu en haleine le public. La tradition est bel et bien vivante à l’île Maurice et cet événement clé du Festival International Kreol l’a, encore une fois, amplement prouvé.

Mahebourg, première ville portuaire de l’ancienne île de France, prend toute son allure et accueille les régatiers de toute l’ile. La régate, c’est toute l’histoire des pécheurs, esclaves affranchis ayant refusés de s’adonner à la culture de la canne pour choisir un champ de liberté…la mer. Le monde de la pêche s’est construit petit à petit autour de cet appel à la liberté, à l’évasion, et à l’appropriation de la mer, nourricière, invitante, et mystique. Les pirogues construites sur des vagues de souvenir et adaptées au lagon de Maurice rivalisaient en couleurs, et en personnalités. Chaque pirogue avait une âme, une histoire, une famille… sa famille.
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Les pêcheurs illustraient ainsi leur adresse, leur agilité en mer. Courage, ruse et vanité avaient fini par donner une dimension toute spéciale à la régate et mettaient en valeur les relations complexes des pêcheurs, et de leurs pirogues avec la mer.
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C’était aussi une raison de la fête ou scintillaient des bouteilles de rhum. Les appels de la ravanne, s’empressaient de libérer les reins pour créer cette ivresse envahissante. Oubliées la fatigue et la misère, pour vivre le présent et boire la vie. La régate a été pendant longtemps un évènement du village et a su apporter sa dose de fierté à chaque village et à chaque clan de pêcheurs et à leur champion.

FIK 2017 ravive cette tradition en lui occultant une flamme toute particulière dans le sillage du 50ème anniversaire de la république de l’île Maurice.
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Le Waterfront de Mahebourg a haussé ses couleurs pour cette occasion, et est devenu un lieu de fête. Des groupes musicaux se sont succèdés tandis que les claquements de voiles fendent des vents contraires. La fête était présente partout.

Des échoppes variées et tout en couleurs ont refait revivre la cuisine créole d’antan, les confiseries et l’artisanat. Un évènement si folklorique pour une belle sortie de dimanche en famille.

 

 

 

La Gazette de Maurice – Cordonnier, un métier traditionnel comme on les aime à Maurice – Par Magali Kinzonzi

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Véritable artisan qui fabrique, répare, rénove ou décore des articles tels que chaussures, sacs, cartables, ceintures et autres objets en cuir et ses dérivés, le cordonnier est un touche à tout. A Maurice, ils sont encore quelques-uns à pratiquer la discipline dans la pure tradition artisanale. C’est le cas de Dominique et Jean Eric. 

Cordonnier? Un métier vieux comme le monde! L’histoire de la chaussure remonte quasiment à la naissance de l’homme étant donné que ce dernier a très tôt ressenti le besoin de se couvrir et de protéger son pied du contact fort rude de la terre. La cordonnerie est donc très ancienne. Selon une étymologie populaire, cordonnier viendrait du mot corde, car les premiers cordonniers utilisaient des cordes pour fabriquer des chaussures. Et contrairement à ce que l’on pense le cordonnier ne fait pas que réparer les chaussures mais il en fabrique aussi !

Aujourd’hui encore, être cordonnier, c’est avoir beaucoup de talent, d’imagination, de patience et surtout, d’une très bonne organisation en plus de l’amour de la qualité du travail.

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Entre savoir-faire et bon relationnel

« Un bon cordonnier est à la fois artisan et commercial. Il doit avoir plusieurs qualités et être capable de développer de nombreuses compétences. A ses savoir-faire techniques seront associées des compétences plutôt commerciales. S’il a une maîtrise des techniques spécifiques du métier et aime la précision, qui suppose bonne aptitude visuelle, une habilité manuelle est nécessaire avec un esprit créatif et plein de curiosité. Il faut aussi faire preuve de patience, avoir un sens de la relation développé en réservant un bon accueil au client» explique d’emblée Dominique Céline Responsable de la production et de la cordonnerie à Julien R, une enseigne historique à Maurice dans la confection de chaussures. Celui qui supervise une équipe de dix personnes a appris son métier sur le tas avec son père. Vingt-cinq ans plus tard c’est toujours l’amour du travail bien fait et la satisfaction client qui séduisent cet artisan toujours réjoui de voir un client repartir avec ses chaussures préférées réparées.

On aura toujours besoin d’un cordonnier

Même son de cloche pour Jean-Eric, cordonnier à Vacoas. Avec un savoir-faire transmis de père en fils son atelier ne désemplit pas.

« On dit souvent qu’être cordonnier est un métier d’homme. Mais moi je ne suis pas d’accord il n’y a pas plus attachée à ses chaussures qu’une femme, d’ailleurs ma femme m’aide beaucoup ! » exprime t-il non sans fierté.

L’atelier de Jean-Eric est à l’image de son propriétaire : accueillant! Son espace, il le cordonnier 2.jpgréaménage souvent pour satisfaire une clientèle qui évolue et se diversifie. «Depuis deux ans, je sens que ça bouge. On aura toujours besoin d’un cordonnier. Les gens reviennent à la réparation. Surtout les jeunes. La crise y est pour quelque chose ! Chez les femmes, les petits talons s’usent vite. Je sais que le métier ne fait pas rêver les jeunes mais c’est dommage, ils gagneraient à perpétuer cette tradition. Cordonnier, c’est un vrai métier mais on n’en a plus assez à Maurice car l’image de l’échoppe noircie peu avenante n’attire pas» renchérit-il. Cependant, réparer un talon, réaliser des coutures sur cuir, changer une semelle intérieure, remplacer une cambrure, réaliser des teintures ou une pièce de remplacement, colmater une déchirure… ne s’improvise pas. Le cordonnier, doit pourvoir maîtriser les différentes techniques et matériel nécessaires aux opérations d’entretien, de réparation et de confection de chaussure ou de toute autre pièce.

Des autodidactes ayant l’amour de leur travail

Parfois, des travaux de rénovation de chaussures haut de gamme nécessitent plusieurs heures de travail et le cordonnier doit être patient, habile et minutieux. Il est appelé à utiliser différentes techniques d’assemblage, de découpe, de couture et de collage. Il s’informe aussi sur les dernières machines et derniers matériaux pour pouvoir assurer à ses clients une prestation à la hauteur de leurs attentes. « Mais en règle générale les peu de cordonniers restant à Maurice sont des autodidactes. Et nous réparons plein de chaussures sans de grosses machines sophistiquées comme on peut voir en Europe. Nous ne passons pas nos journées à réparer des semelles la palette du cordonnier est large il y a la réparation des sacs, des ceintures ou encore des articles en cuir » détaille Jean- Eric. Qui a dit que la cordonnerie n’avait plus d’avenir ?

Festival International Kreol : Sega Lontan, hommage aux grands défenseurs du saga

Festival International Kreol

 Sega Lontan (Sega d’une époque lointaine) reste au cœur du Festival Kreol comme une reconnaissance de la contribution des artistes qui ont marqués une belle époque du Sega durant les 20 dernières années. Le Sega Lontan regroupe en effet des personnalités connues, notamment des paroliers qui ont donné un style et un ton particulier au Sega très rythmé et très dansant. FIK 2017 leur donne voix au chapitre car ils ont été des grands défenseurs du Sega et ont beaucoup contribué à le faire connaitre au-delà de nos rives.

Sega Lontan (Sega d’une époque lointaine) reste au cœur du Festival Kreol comme une reconnaissance de la contribution des artistes qui ont marqués une belle époque du Sega durant les 20 dernières années. Le Sega Lontan regroupe en effet des personnalités connues, notamment des paroliers qui ont donné un style et un ton particulier au Sega très rythmé et très dansant. FIK 2017 leur donne voix au chapitre car ils ont été des grands défenseurs du Sega et ont beaucoup contribué à le faire connaitre au-delà de nos rives.

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La sélection des artistes faite par le comité d’organisation du FIK 2017, a tenu compte des artistes qui sont pour la plupart âgées de plus de 60 ans et qui ont été les valeurs sûres du Sega mauricien. La liste n’étant pas exhaustive, le comité a consulté l’un après l’autre pour solliciter leur participation comme valeur symbolique. Etant donné la nature de cette évènement, qui rend hommage au Sega d’antan, quelques uns de nos artistes seront appelés à reprendre des chansons des artistes disparus ou indisponibles. Serge Lebrasse, un des symboles des plus marquants de Sega Lontan, étant souffrant, le comité reviendra vers lui à une semaine du concert.

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Pour accompagner ces artistes, il fallait recourir à un orchestre et une personne ressource connaissant les artistes des chansons, leur rythme et inspirant confiance aux artistes participant, donc certains sont très connus. Apres examen et analyse, le comité s’est porté sur Karl Brasse, lui-même chanteur et artiste qui cadre bien avec l’esprit de Sega Lontan. Karl Brasse sera donc appelé à accompagner tous les artistes durant le concert. Karl Brasse et son orchestre devront s’assurer des répétitions et de la prise de contact avec tous les artistes et être présents pendant les 6 heures du concert. Karl Brasse a d’ailleurs déjà accompagné plusieurs de ces artistes disparus ou indisponible, à qui hommage est rendu.
L’impressionante foule qui s’est déplacée pour écouter les chanteurs a grandement avalisé le choix des organisateurs du Festival.

Brexit is UK’s Vietnam as ‘no one wants to say it’s not going well’, says Conor Gearty, professor of human rights law at the London School of Economics.

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‘Taking back control is a long war, fed by scapegoats for failure’

Brexit has parallels to the Vietnam War in terms of the violation of human rights and British people’s reluctance to criticise it for fear of being labelled unpatriotic, according to a professor.

Conor Gearty, professor of human rights law at the London School of Economics, wrote in a blog post: « Brexit strikes me as our Vietnam. Everybody rational knows it is – how can I put it politely? – not going well. But no one with authority seems able to say so. »

He warned against Brexit resulting in a « large transfer of power to the executive branch », referring to the so-called Henry VIII clause which allows the Government to adopt and disband EU laws without requiring a vote in Parliament.

Potential changes after Brexit, Mr Gearty said, could affect equal pay, health and safety protection, holiday entitlements, clean air and food standards – issues that the UK was « hostile » towards as part of its drive to become a « low-regulation, business-friendly » country.

« Expect more denunciations of human rights law as post-Brexit reality bites – ‘taking back control’ is a long war, fed by scapegoats for failure, » he wrote.

The professor warned it would be harder to ascertain causality between Brexit and « deaths, ill-health or misery » compared to the « tangible evidence of impact » – ie the body count in Vietnam – and that it was easier to link negative impacts to almost a decade of austerity.

For example, the Institute for Fiscal Studies found there would be 5.2 million children in the UK living in poverty in five years’ time.

However, he said a hard Brexit would mean a « shrinking of opportunity for UK citizens – in terms of education abroad; freedom of movement; access to health care when abroad, and much else. »

Even under a potential Labour government in the near future, which he said was highly probable, he questioned socialists’ stance towards the Human Rights Act, which he said made figures like Jeremy Corbyn in the 1970s « suspicious… [the Act was thought of as] a tool with which the powerful could resist change. »

Mr Gearty added that Irish citizens were also being « ignored ».

His blog came in the same week that international trade minister Liam Fox said he could not rule out the possibility of a hard border with Ireland until Brexit had been finalised.

Ifri – Institut français des relations internationales – La politique africaine de la France à l’épreuve de la diversité du continent- par Alain ANTIL, directeur du Programme Afrique subsaharienne de l’Ifri.

La présence sur le continent africain est un élément clé de la puissance de la France, ou tout du moins de son influence. Elle a toujours été une priorité de son action extérieure. Pour le demeurer, elle devra s’adapter aux mutations profondes du continent, et à la diversité des dynamiques qui le traversent.

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Sécurité

La France a mené une cinquantaine d’opérations militaires sur le continent africain depuis les indépendances. Après la fin de la guerre froide et à la suite du génocide rwandais, Paris a souhaité ne plus jouer le rôle de « gendarme » de l’Afrique, et a opté pour une triple inflexion de sa politique : intervenir avec de solides mandats internationaux ; tenter de pousser l’Union européenne (UE) à s’impliquer davantage ; et enfin contribuer au renforcement des armées nationales et à l’édification d’une architecture africaine de sécurité. Cette politique a été mise en œuvre au cours des vingt dernières années dans un contexte de réduction du budget de la défense, ce qui s’est traduit par une réduction du nombre de militaires français pré-positionnés en Afrique.

Le premier objectif a été atteint. Le deuxième partiellement : si des pays européens participent aujourd’hui à des opérations de maintien de la paix, leur participation demeure exceptionnelle et légère. Le troisième est loin d’être atteint, ce qui oblige régulièrement la France à intervenir parce qu’elle est la seule à pouvoir le faire, du moins dans les phases initiales du conflit. C’est ainsi que l’on peut interpréter les interventions au Mali (Serval) et en République centrafricaine (Sangaris). Le désengagement français semble impossible, à en juger par la fragilité actuelle de la bande sahélo-saharienne, dont les soubresauts politiques pourraient avoir des conséquences directes sur le Maghreb et le bassin méditerranéen. L’adaptation de l’opération Barkhane, qui regroupe 3 500 militaires, est la clé pour la stabilisation de la bande sahélo-saharienne.

Diplomatie économique

La France est toujours l’un des principaux investisseurs et l’un des plus importants partenaires commerciaux du continent. Ses parts de marché diminuent en raison de l’émergence de concurrents africains et non africains. Si les grands groupes français sont bien armés pour maintenir ou conquérir des marchés, les PME/PMI françaises sont en revanche beaucoup moins outillées et soutenues. Le continent africain représente des marchés en croissance pour lesquels l’appareil industriel français dispose d’atouts (BTP, réseaux d’eau, transports, etc.). Parallèlement, la contribution de la France à la sécurité du continent constitue un utile soutien à sa diplomatie économique. Cependant, trop d’initiatives et de structures, parfois concurrentes, sont censées défendre les intérêts français. Cette surabondance nuit à l’efficacité d’ensemble de cette diplomatie économique. L’échec de l’initiative « Énergies pour l’Afrique » est une illustration de cette politique en ordre dispersé.

Francophonie

Bien que leader naturel de la francophonie, la France apparaît souvent en marge des institutions francophones et ne semble pas en faire un axe cardinal de sa politique étrangère. Se jouent pourtant autour de la francophonie des enjeux d’influence liés au droit, au commerce, aux organisations internationales, ou encore à la diffusion des œuvres culturelles. De plus, compte tenu des évolutions démographiques des pays francophones d’Afrique, le français pourrait gagner des centaines de millions de locuteurs au cours du xxie siècle. Cette évolution est théorique, car si la France ne se réengage pas davantage dans la coopération (envoi de professeurs, soutien aux institutions scolaires, etc.), cette progression de la langue française ne se concrétisera pas. La francophonie pourrait être également utilisée comme levier de promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, objectif plus facile à promouvoir dans ce cadre que dans une relation bilatérale, où chaque recommandation peut être dénoncée comme une atteinte à la souveraineté. Le soutien prolongé à des régimes autoritaires, pour des raisons sécuritaires ou économiques, a terni l’image de la France auprès des populations jeunes de ces pays qui seront peut-être les élites de demain et pourraient alors se détourner d’une relation privilégiée avec Paris.

Aide au développement et à la bonne gouvernance

L’Afrique a une population jeune qui peine à s’insérer dans des marchés de l’emploi incapables d’absorber la masse des nouveaux entrants. Cette jeunesse est porteuse de potentialités : elle tente de se trouver une place dans les sociétés africaines, notamment en créant des mouvements citoyens pour réclamer le respect des droits politiques mais aussi économiques. Parallèlement, cette jeunesse est également porteuse de tensions si des emplois ne sont pas massivement créés. La coopération et l’aide au développement françaises sont des éléments d’influence (soft power) mais doivent intégrer davantage ces enjeux (création d’emplois et respect des droits civiques). Cela passe aussi par une attention accrue aux évaporations de l’aide observées dans certains pays récipiendaires.

Au moment ou le Président est en Afrique et s’exprime en toute lucidité sur nos rapports avec ce grand continent. J’ai jugé bon de partager cette étude qui ne s’arrête pas à un mot sorti de son contexte, qui sert de défouloir et permet à certains qui ont miné l’action de l’ancien Président, de s’émouvoir aujourd’hui. Oui, l’Afrique est partout et la France aussi dans ce nouveau monde.

Banque mondiale – Comment utiliser les TIC pour mieux gérer le secteur de l’éducation dans les pays fragiles ? – par Maria Amelina

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Des solutions mobiles qui améliorent la gestion du système éducatif

Observons ensemble ces images : dans la première, des villageois examinent une affiche ; dans la deuxième, des enseignants ajoutent des chiffres à des affiches similaires et dans la troisième, des fonctionnaires choisissent des modèles d’interface avec l’aide d’un technicien. Aucune de ces images ne montre à proprement parler quelque chose que l’on pourrait qualifier de « technologie de pointe ». Elles représentent pourtant chacune une étape d’un projet innovant et insolite.

Un projet qui a introduit des innovations technologiques dans la vie des citoyens et incite les fonctionnaires à être à l’écoute de ces citoyens et de répondre à leurs attentes.

Il s’agit d’Allô, École ! une plateforme éducative mobile financée par l’Agence belge de développement et mise en œuvre par le ministère de l’éducation nationale de la République démocratique du Congo (RDC), avec l’aide de la Banque mondiale.

À l’heure actuelle, cette plateforme offre trois fonctionnalités :

Elle diffuse des messages du ministère auprès des services déconcentrésdes enseignants, des directeurs d’établissement scolaire et des parents d’élèves. Des messages oraux (indispensables aux parents analphabètes) et des textos annoncent par exemple la prochaine distribution de manuels scolaires ou le prélèvement des frais de scolarité. La RDC, dont le territoire immense équivaut à la taille de l’Europe occidentale, possède une infrastructure routière extrêmement limitée qui complique la communication entre Kinshasa, la capitale, et le reste du pays. Surfant sur la vague du mobile, dont la pénétration sur le marché local ne cesse d’augmenter, cette plateforme permet de gagner du temps et de réduire les distances en interconnectant toutes les parties prenantes du secteur éducatif.

Elle améliore la gouvernance et réalise des sondages en envoyant de petits questionnaires et gère rapidement les réponses. Le ministère peut par exemple, envoyer un message à ses services déconcentrés pour fournir les nouveaux barèmes nationaux des frais de scolarité à appliquer à la prochaine rentrée et réclamer un accusé de réception. Comme elles sont enregistrées sur la plateforme, les réponses ont valeur officielle et dissuadent certains fonctionnaires de surfacturer les parents. Autre exemple : l’administration centrale peut effectuer une enquête auprès des directeurs d’établissement pour comparer le nombre d’élèves au nombre de manuels disponibles. L’analyse des données recueillies permet de mieux cibler les politiques publiques et les actions sur le terrain.

Elle permet d’échanger avec les parents au sujet de l’éducation de leurs enfants. Par exemple, en recoupant les informations obtenues auprès du directeur d’établissement concernant les manuels scolaires, avec les réponses fournies directement par les parents sur l’utilisation de ces manuels dans la salle de classe de leur enfant, le ministère peut entreprendre des actions pour remédier à un éventuel problème.

Mais est-ce facile de faire fonctionner une plateforme mobile de communication et de responsabilisation ? Allons fouiner un peu dans les coulisses de la mise en œuvre de ce type de projet. Il s’agit en fait d’une pièce en plusieurs actes, qui exige une certaine dose d’art et de science, avec au final un meilleur système éducatif lorsque le rideau se lève !

Acte 1. La technologie. Il faut tout d’abord trouver un organisme ayant déjà développé et utilisé une technologie adéquate, pour ensuite l’adapter aux utilisateurs et la rendre la plus intuitive possible. Dans le cas de la plateforme Allô, École ! il fallait concevoir une interface et des icônes attrayantes et faciles à utiliser par les fonctionnaires congolais. L’autre étape importante, qui peut paraître simple mais qui ne l’étaient pas du tout dans le cas de notre projet en RDC, est de démarcher les opérateurs de téléphonie mobile pour négocier un accord et obtenir un numéro abrégé et gratuit qui facilite les communications (d’où le chiffre 178 que vous voyez dans l’une des photos). Tout cela vous semble difficile ? Nous le pensions aussi… mais cette étape s’est avérée être la plus facile. Les étapes institutionnelles étant bien plus compliquées et demandant une attention particulière.

Acte 2. La vulgarisation. Chaque établissement scolaire sélectionné dans la phase expérimentale reçoit un numéro de plateforme à trois chiffres, comme celui que vous voyez dans la photo qui montre un enseignant écrivant sur l’affiche. Puisque la phase expérimentale comporte un essai contrôlé randomisé (ECR), les établissements de traitement reçoivent une visite de la part d’une ONG, un jeu d’affiches, et une démonstration de la technologie sur un appareil de base. Des messages portant sur l’absentéisme des enseignants, la disponibilité des manuels scolaires etc. sont enregistrés dans les quatre langues nationales. On a aussi « pimenté » l’enregistrement en faisant appel à des voix de vedettes nationales afin d’inciter les parents à se servir de la plateforme (comment un parent peut-il résister au message de son idole, l’entraîneur de l’équipe nationale de foot, lui demandant de participer à cette plateforme ?)

Tout est déjà bouclé ? On l’a presque cru ! Au cours des quatre premiers mois de mise en œuvre du projet, le service de communications du ministère a reçu 8 000 appels à travers la plateforme Allô, École ! Les parents faisaient état d’un manque de manuels scolaires, du non-respect des normes de construction des établissements scolaires, et de l’absentéisme enseignant. Les gestionnaires de la plateforme ont envoyé systématiquement des messages de remerciement et des promesses de suivi. Mais après avoir effectué deux ou trois investigations ponctuelles, on s’est rendu compte qu’il fallait une étape de plus. Car le ministère, qui avait voulu créer cette plateforme pour se rapprocher des citoyens, n’avait pas encore les capacités nécessaires pour être réactif. Il était content d’être entré dans l’ère des « nouvelles technologies », mais devait à présent repenser son organisation institutionnelle pour pouvoir en profiter. Il lui fallait une « trame » qui « lie » les différents éléments de la pièce en un tout interconnecté et performant. Nous retournons donc dans les coulisses…

Acte 3. Le personnage secret. Nous n’avons rien à cacher… mais nous essayons, dans une situation complètement inédite, de renforcer et de « normaliser » les capacités de réactivité du ministère. Dans cette optique, le ministre a nommé un directeur général très respecté au poste de coordinateur de la plateforme Allô, École ! Ensuite, on a recruté de jeunes consultants pour travailler dans le nouveau service clientèle de chaque département pendant six mois, afin d’aider les fonctionnaires normalement en charge de cela à se familiariser avec cette nouvelle technologie et à prendre confiance en eux. Enfin, on a élaboré des protocoles et testé les différentes fonctionnalités mentionnées plus haut. Petit à petit, la plateforme a fait partie intégrante du quotidien du ministère.

Bon, alors, récapitulons. Les premières enquêtes sont envoyées, les questionnaires remplis par les parents sont en cours de traitement… le ministère obtient en temps réel des informations concernant la situation sur le terrain et s’est adapté pour pouvoir y réagir rapidement. Il est à priori temps de sonner les trois coups et de lever le rideau.

Avons-nous terminé ? 

Eh bien non, car il faut comprendre qu’il s’agit en fait d’un chantier perpétuel. La plateforme Allô, École ! doit constamment s’adapter à un contexte qui ne cesse d’évoluer.

Les premiers résultats des tests de résistance de cette plateforme sont tout de même encourageants : malgré la détérioration de la situation budgétaire du ministère, la plateforme a été modifiée et ses fonctionnalités élargies. La plateforme Allô, École ! s’est intégrée dans un environnement qui évolue et n’est pas restée figée dans le temps.

Nous vous invitons d’ailleurs à suivre son évolution en écoutant régulièrement nos futurs podcasts au cours desquels les différents acteurs partageront la manière dont ils ont vécu la mise en œuvre de ce projet.

Maria Amelina est une Spécialiste du groupe gouvernance de la Banque mondiale. Elle travaille actuellement sur les pays d’Afrique centrale et orientale se concentrant sur la Amelinagouvernance du secteur particulier dans les paramètres fragiles. Dans sa carrière à la Banque mondiale Maria Amelina a travaillé sur les questions de décentralisation, développement local, axée sur la gouvernance et la responsabilisation. Elle a dirigé des études opérationnels et analytiques en Europe centrale, des opérations innovantes en matière d’engagement civique et de budgets participatifs. Plus récemment, elle se concentre sur les aspects analytiques et opérationnels de l’utilisation des TIC pour améliorer la transparence et la responsabilité de la prestation des services. Maria Amelina est titulaire d’un doctorat de la Fletcher School of Law et de la diplomatie, administré conjointement par Harvard et Tufts.

 

World Economic Forum –  International trade is slowing. What does this mean for globalization?- by Jaime Malet Chairman, American Chamber of Commerce in Spain

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The World Trade Organization predicts a slight recovery in international trade for 2017 and 2018, albeit with many uncertainties.

Historically, the volume of world merchandise trade has tended to grow between 1.5 times to twice as fast as world GDP. But since 2012, trade has only been growing at a rate equal to or below that of GDP. In 2016, 20 of the world’s largest shipping companies sold $120 billion, compared to $200 billion in 2012. The downturn of the Chinese economy and other emerging economies, as well as the contraction of investment in the US during recent years, may explain part of this deceleration – but not all of it. Other technological and political factors could indicate a long-term anti-globalization trend. This would create a world very different to the one we know.

Firstly, technological development is bringing production and manufacturing closer to the final destination of goods – the end user. The most obvious example is energy. We have new technologies for extracting oil. We are making progress in renewable energy to tackle climate change. As technology improves in these areas, the dependence of US and European energy consumers on third-party countries decreases. As a result, so does the need to transport millions of barrels of oil (55% of world trade in 1970) and tons of coal.

Thanks to new shale extraction techniques, the US – the world’s leading energy consumer – is becoming energy independent in oil and natural gas. This has a large impact on world trade and geopolitics. Given its growing energy independence, the US may reduce its onerous role as guarantor of maritime security. A large part of its interest in this role, which it has played since 1945, has been to ensure the transport of fossil fuels to the West.

Question: “Overall, do you think globalization is a force for good or bad for the world?”

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Image: Visual Capitalist

Even more relevant, though still in its infancy, is the impact of robotic development on international trade. As the Fourth Industrial Revolution and its process of extreme automation spreads through our factories, and as robots become more efficient and affordable, practices such as offshoring manufacturing to places with cheap labour will most likely decline. Why relocate a factory to Vietnam or Poland if it can stay in California or Stuttgart with reliable robots that are more accurate, can work 24/7, and are less demanding than human workers? Millions of employees in the East may lose their jobs over the next few decades, substituted by robots in the West.

Advances in 3D printers may soon make it possible to substitute large factories with much smaller ones, closer to the consumer, where the manufacturing process is simplified thanks to the reproduction of models. Other radical changes in artificial intelligence and nanotechnology will come. New materials could be manufactured near the consumer, in order to substitute natural materials that need to be transported from distant mines and deposits. These changes will become more apparent over the next decade and will also influence the contracting process of trade. With less international trade and less maritime security, the price of maritime transport may spiral upwards.

Nevertheless, political reasons are an influencing factor, as evidenced by the latest European and US elections and Brexit. There are important sectors of the Western population that feel that abandoned by globalization.

The process of accelerated globalization, which began with China’s entry into the WTO on December 11, 2001, has been extremely positive for humanity as a whole. This model of globalization consists of offshoring manufacturing to countries based on cost efficiency variances, primarily labour costs. It lifted billions of people out of poverty in Asia, Latin America and Africa, and it allowed developing countries to grow significantly.

During the last 17 years, China increased its GDP from $1.2 trillion to $11 trillion, a sign of historically unprecedented growth for a country of this size. A similar phenomenon occurred in India, Vietnam and others. This model of globalization has also supported the growth of large multinational companies that have been able to offshore production processes and increase directors’ and shareholders’ income, as well as those of their employees and suppliers (including SMEs).

Furthermore, it has been excellent for consumers, enabling everyone to access an endless number of products at competitive prices. However, these benefits are not noted in the industrial communities of the American Midwest, in the mining and metallurgical areas of Liverpool and Manchester, and in formerly industrialized, rural areas of France. The people of these communities, duly indoctrinated, are starting to form the backbone of western democracies. They are afraid of a world of which they are losing grasp. These people call for tariffs and protectionism. Whether we like it or not, leaders of any political persuasion must make them happy by imposing stricter rules on trade (fair trade) by enforcing tariffs or abandoning certain trade agreements, even if some of us think this will not bring back the jobs as promised.

International trade of goods based on offshore manufacturing will obviously continue to exist, but it will tend to decline below world GDP growth. International organizations that were created after the Second World War will have to focus on the new challenges a different kind of globalization brings. These will require coordinated responses to other issues, such as climate change, migration, major financial crises, investment protection and cybersecurity.

La Gazette – Hell-Bourg, seul « Plus beaux villages de France » d’outre mer par Anne Lebot

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On y revient volontiers, car son capital séduction est assez remarquable. Ses nombreux points de départ pour la marche en haute montagne, ses maisonnettes coquettes et fleuries y sont pour beaucoup. En faveur d’une autre lecture de ce village des Haut de La Réunion, rien de tel qu’un « guide péi » pour le découvrir au rythme de son paisible pouls

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Situé dans la cirque de Salazie, le plus arrosé de l’île, Hell-bourg labellisé « Plus beaux villages de France » depuis 1998 tire son identité d’une âme authentiquement créole et d’une architecture Belle époque héritée d’une activité thermale désormais révolue. Le charme opère dès l’entrée par la route principale. Vu nulle part ailleurs dans l’île, vert pistache, jaune canari, bleu ciel ou rose saumon sont les couleurs choisies pour habiller les maisons, scrupuleusement entretenues par la municipalité. Une singularité issue des régulières opérations coup de pinceau, dont le premier fut donné dans les années 80 à l’initiative de Raphaël Folio, un habitant soucieux de sauvegarder sa maison créole, le patrimoine du village et le concours d’Yves Augeard, architecte des Bâtiments de France en fonction à La Réunion. « On s’est aperçu en grattant les premières couches de peinture, que blanc cachait en fait du bleu, du jaune ou du vert. Le village n’a fait que réhabiliter ses couleurs d’origine», raconte Dominique, mon « guide pei ». L’aurais-je su, sans ces digressions à caractère géographique ou culturel dont Dominique, plus connu sous le sobriquet de Dodo est porteur, j’en doute.

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Herbe à Sitarane et bois de contrebande

Si le circuit touristique convenu du village passe par la Villa Folio, une demeure représentative de l’architecture typique du 19ème siècle et désormais ouverte au public, son Eco-musée, celui des Musiques et des Instruments de l’océan Indien, l’institution Dodo guide péiqu’est devenu l’hôtel-restaurant « Le relais des cimes » pour cause de cuisine goûteuse où le chouchou tient une place de roi, le « guide péi » entraîne sur des terrains d’évidence moins immédiate mais tout aussi intéressants. Au cours d’un détour à Mare à poule d’eau, un plan d’eau fréquenté par les pêcheurs et les jeunes amoureux, les fleurs du datura, prolifiques autour de la mare deviennent sous ses mots de l’herbe à Sitarane, « un meurtrier ayant semé le chaos dans l’île au 19ème siècle qui se servait des propriétés paralysantes de cette fleur avant de fondre sur ses proies», et l’écorce des immenses camphriers alentours, du bois de contre bande, en deux mots. « Ce nom parce que l’on donnait des décoctions de ce bois aux marins en mer durant de longs mois pour calmer leurs ardeurs », poursuit Dominique en souriant. Ce dernier promet maintenant un endroit qui dépasse en authenticité tout ce que l’on aurait déjà pu découvrir dans les villages reculés de l’île. Du bord de la route principale, démarre un sentier ombragé par une voûte végétale construite par un entrelacs indescriptible d’arbustes, d’arbres et de lianes. A son bout se dresse une maisonnette, aux allures de cabane rustique appartenant à Georges Lafable. Il se tient là d’ailleurs, devant ce qu’était la maison où il est né et où il a vu naître ses neuf enfants.

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unique survivance de la case en paille typique

« La case tonton », issu du surnom affectueux donné à cet homme de 80 ans qui travaille encore son « karo de terre» est la dernière survivance de la case créole typique des Hauts, en paille de vétyver et avec des pages de journaux et magazines collés auxGeorges Lafable dit toton murs intérieurs. Il n’en reste qu’une et elle se trouve à Hell-Boug. Son propriétaire n’y habite plus, mais la municipalité a décidé de faire le nécessaire pour que ce témoignage incroyable du siècle dernier résiste au temps et puisse être vu d’un maximum de visiteurs. Ressorti de la petite dépendance qui sert de cuisine qui abrite encore la meule servant à broyer le maïs, «Tonton » nous entraîne vers son jardin où se côtoient dans un fouillis qui régale, des plants de café, des avocatiers, des tomates arbustes, des grenadilles ou barbadines – fruits de la passion -, et des plantes aromatiques dont l’héliotrope au parfum délicat et le romarin, à boire en infusion salée, en cas de « gros saisissement», recommande « Tonton », tentant de cacher sa fierté d’être le créateur de cet Eden des Hauts sous un demi sourire. Une alternance entre une architecture faisant la part belle aux lambrequins comme un clin d’œil à son faste d’antan et un plongeon au cœur d’une Réunion plus prosaïque voilà de quoi est fait Hell-Bourg également Village créole depuis 2002, label qui valorise « un tourisme responsable, respectueux de l’homme et de l’environnement.

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Guid’ a nous » pour découvrir autrement

Il s’agit du réceptif de Dominique, un des pionniers de la corporation des guides péi et reconnaissable à son chapeau en paille éternellement vissé sur la tête. « Guide péi » depuis 20 ans et guide conférencier depuis 2012, il propose une série de circuits nature bien sûr, mais aussi en ville. Parmi eux, outre la « Balade à Dodo » effectuée sur le site de Salazie avec un départ depuis Hell-Bourg et qui intègre un déjeuner champêtre avec cuisine au feu de bois, « Guid a nous» a créé une formule qui suscite un engouement sans égal  avec son circuit religieux. Il couvre en une matinée la visite de la Cathédrale Saint-Sauveur de la rue de La Victoire, la mosquée Noor al Islam, la première mosquée à avoir été construite en France, et les deux temples chinois « Traversée heureuse « et Prospérité éternelle », ainsi que le temple hindou « Kalikambal », – seulement  à l’extérieur -, tous situés à Saint-Denis. Un beau symbole de ce qu’est l’unité réunionnaise.

La Gazette de Maurice – Entretien de Nathacha Appanah, romancière mais pas seulement

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Si l’on décide un jour d’écrire un livre…? Pas en ce qui concerne Nathacha Appanah. Car un roman n’est pas un sujet, à l’opposé d’un reportage. Car l’aurions-nous oublié, l’auteure de Tropiques de la violence, roman primé par le Fémina des Lycéens 2016 est aussi journaliste. Et selon la posture engagée, les mots ne s’attrapent pas et ne s’agencent pas sur la page de la même manière.

De retour sur ses terres natales à l’invitation de l’Institut Français de Maurice il y quinze jours, la romancière a donné une conférence publique et animé un atelier d’écriture intitulé « Autoportrait impressionniste d’une jeunesse mauricienne» à destination des jeunes auteurs locaux. Elle nous parle volontiers de son approche de l’écriture selon qu’elle se place comme écrivain ou journaliste. De quelle façon une idée plutôt qu’une autre finit-elle par se métamorphoser en livre…? Si ce n’est un itinéraire toujours plus ou moins tortueux, la naissance d’un livre ne répond à aucune règle selon cette grande admiratrice, – dans le désordre-, d’Annie Ernaux, de Margaret Atwood et de la poétesse Anna de Noailles*. « Il y a d’abord une interrogation, suivie d’une curiosité, de recherches et du travail, une nécessité absolue et pourtant passée sous silence », sourit-elle. Parmi toutes les ébauches qui remplissent son placard,« c’est finalement l’histoire, devenant au fil des mots une entité vivante qui finit par décider si oui ou non, elle va aboutir, car une fois le cahier fermé, elle nous ramène vers elle par un fil invisible », poursuit l’écrivain. Ce fil même, solidement tissé avec Tropique de la violence, son dernier roman, un plongeon dans une Mayotte dure, sordide, aux antipodes des clichés exotiques, qui a exigé un long temps de gestation, soit six ans en tout.

Je suis restée très attachée à Mayotte, où j’ai été marquée par un vécu exclusivement tourné vers l’enfance. Incarnée d’abord par ma fille alors bébé, l’enfant seul et démuni de Mayotte que je pouvais observer chaque jour et l’enfant intérieur, celui de l’écriture que je n’arrivais pas à enfanter sur place – Nathacha Appanah

L’indispensable rêverie

Décidément oui, la naissance d’un roman passe toujours un itinéraire improbable rappelle l’écrivain, car son retour de Mayotte a été suivi d’un cinquième roman, En attendant demain – qui plante son décor sur les bords de l’Atlantique -, avant d’achever Tropiques de la violence. La littérature permet cela, cette douce possibilité de se perdre dans les méandres de la rêverie et de la flânerie sans avoir à se soucier de marquer la frontière entre le réel et la fiction, ni à s’inquiéter d’une quelconque date butoir quant à la pose d’un point final.

« Ce qui est essentiel à la littérature n’a pas sa place dans le reportage », poursuit Nathacha Appanah. Elle évoque alors celui conduit pour le magazine Géo au Sri Lanka au sortir du tsunami meurtrier de 2004 où son investigation l’a bouleversée au point d’en vouloir faire un livre. « Mais ce désir s’est opposé malgré moi à l’impossibilité de transformer ce dont je me suis nourrie en roman, simplement parce que sur place lors de mes investigations de reporter, je n’ai laissé de place ni à la rêverie, ni à la flânerie, des considérations indispensables à la composition d’une fiction». Nathacha Appanah la romancière, s’efface en effet en discontinu pour laisser raconter, tantôt la journaliste qui fournit le journal français Libération en reportages, – le dernier en date était consacré à l’enseignement du français aux allophones – tantôt la chroniqueuse du jeudi, pour le quotidien régional français La Croix.

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Son œuvre préférée gardée sécrète

Celle qui ne reprend jamais ses livres une fois publiés, sauf dans le cadre de séances de lecture publiques, avoue chérir particulièrement un de ses six romans. « Parce qu’il est associé a une histoire personnelle, je ne le révèlerai jamais. Une mère donnerait-elle le nom de son enfant préféré si elle en avait un? C’est quelque chose de non avouable, de profondément et de définitivement enfoui», appuie t-elle. Occupée à honorer les nombreux festivals littéraires qui réclament sa présence et à finir la traduction d’un roman anglais, l’écrivain se donne aujourd’hui le temps d’attendre. Un déclic non programmé, à l’issue d’une rencontre, au détour d’une route, à la vue d’un paysage, qui l’investira et lui donnera l’envie d’initier une nouvelle naissance.

Six romans remarqués en 13 ans

  • Dès Les Rochers de Poudre d’Or publié en 2003, un premier roman qui retrace l’épopée des travailleurs indiens venus remplacer les esclaves dans les champs de canne à Maurice, Nathacha Appanah rencontre le succès. Il se confirmera avec Blue Bay Palace en 2004, une fenêtre ouverte sur une Maurice écartelée entre son image carte postale et une société très marquée par les classes et les préjugés.
  • Dans La noce d’Anna, paru en 2005, la narratrice, pendant la journée du mariage de sa fille, Anna, s’interroge sur la transmission entre mère et fille.
  • Le Dernier Frère, sorti en 2007, aux éditions de l’Olivier, raconte l’histoire de Raj et de David, deux enfants reliés par l’innocence brisée et l’envie de fraternité dans un monde fracturé par la seconde guerre mondiale.
  • En 2015, Nathacha Appanah nous propose En attendant demain, avant le très remarqué Tropique de la violence, son sixième roman sélectionné pour les prix Goncourt et Médicis, qui dépeint l’univers terrifiant d’une jeunesse mahoraise désenchantée et livrée à elle-même. Ses romans sont traduits dans 16 pays.

*A reçu le prix Anna de Noailles de l’Académie française le 22 juin dernier.