Lorsque je me suis arrêté mardi matin devant l’Hôtel de Ville de Curepipe, ou ce qu’il en reste, j’ai été partagé entre un sentiment de rage et de résignation …
La rage, tout d’abord, m’a fait dire en mon for intérieur, «Mais b….. de m…., n’y a-t-il personne dans ce pays pour prendre les devants de la rénovation de ce bâtiment historique? N’y a-t-il que des assassins patentés de notre patrimoine au sein des autorités incompétentes? » Puis la résignation devant ce cauchemar patenté qu’est devenue cette belle et élégante bâtisse : «À défaut de trouver un sauveur pour l’Hôtel de Ville, ne pourrait-on pas, parmi ces assassins qui s’ignorent, en trouver un plus cruel que les autres pour euthanasier cette maison afin d’abréger nos souffrances?…»
En attendant, je supplie les autorités irresponsables d’enlever des rues de Curepipe tous ces poteaux indicateurs qui indiquent la voie à suivre aux touristes de passage dans les hauts pour se rendre à l’Hôtel de Ville…
Il y a encore quelques mois, des prélarts jetés au hasard du toit par une main secourable donnaient bonne conscience aux autorités irresponsables. Aujourd’hui, des arbres, eh oui!, ont commencé à pousser sur le toit en bardeaux. Le plafond de la varangue est défoncé et commence à s’écrouler. Fort heureusement pour moi, des semblants de barrages aussi pourris et minables que notre volonté d’agir m’ont interdit l’accès à l’intérieur du bâtiment car le spectacle doit être franchement horrible. Le point de non-retour n’a-t-il pas déjà été atteint ?
Rénovation à Rs 135 millions
En décembre 2016, une réponse à une question posée sur la rénovation de l’Hôtel de Ville avait été déposée à l’Assemblée nationale. Elle stipulait que la rénovation coûterait… 135 millions de roupies.
Choisi par les autorités incompétentes pour la rénovation, le cabinet de consultants Desai attendait toujours le feu vert du Project Plan Committee.
Cette maison, qui s’appelait jadis la Malmaison, avait été transposée de Moka en 1902, et reconstruite à l’identique par des gens qui avaient alors le sens de l’esthétique et de la préservation des belles choses. Aujourd’hui, dans le domaine public, l’esthétique n’est plus qu’un vague souvenir, l’entretien une fonction inconnue et la cacophonie totale dans les esprits devenus irresponsables…
« J’irai cracher sur vos tombes », disait le grand Boris Vian en 1947. Ne pourrait-on, afin de permettre aux gens dégoûtés et écœurés par tant d’incurie criminelle d’en faire de même, inscrire les crimes patrimoniaux commis sur les sépultures des irresponsables qui en étaient responsables au moment des crimes ?
Le point de non-retour ayant été atteint en matière de non protection de notre patrimoine, qu’on puisse au moins garder traces de ces crimes dans les cimetières, ou ce qu’il en restera bientôt .
J’ai été aussi très surpris, de constater cet abandon manifeste du patrimoine, l’an dernier.