Radio France Internationale –Un guide pour lutter contre l’égo trip humanitaire en Afrique – Comment éviter le cliché ou le complexe du «sauveur blanc». Par Laure Broulard 

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Comment se comporter sur les réseaux sociaux lorsqu’on est volontaire dans une ONG en Afrique ? Comment éviter de véhiculer des stéréotypes ? Le fond d’assistance international des étudiants et chercheurs norvégiens (SAIH) a la réponse. Dans un petit guide récemment publié sur internet, l’organisation met en garde contre les clichés du « white savior » ou « sauveur blanc » avec humour.

Le cliché ou le complexe du « sauveur blanc », c’est cette idée selon laquelle de jeunes européens ou américains viennent en Afrique faire du travail humanitaire pendant leurs vacances, et aiment à se représenter en train de le faire. Selon les étudiants norvégiens membres de la SAIH, cela s’exprime aujourd’hui principalement sur les réseaux sociaux, ou les « volontouristes » comme ils les appellent, publient des photos d’eux au milieu d’enfants rachitiques, dans des écoles et des hôpitaux sur le continent.

Alors si c’est souvent fait avec les meilleures intentions du monde, l’organisation norvégienne met en garde contre des dérives, et donne des conseils : demander la permission avant de prendre quelqu’un en photo et de la publier sur les réseaux sociaux, éviter les hashtags tels que #SaveTheWorld (sauver le monde), se demander si on aimerait être pris en photo dans une situation similaire… etc…

Le tourisme de la pauvreté

Dans une vidéo publiée (voir ci-dessous) en même temps que le guide, on peut voir une jeune femme arriver en Afrique, portant minishort et décolleté plongeant, engagée dans une véritable course à la mention j’aime sur Facebook, sans faire aucun effort pour comprendre la culture. La video conclut : « La souffrance obtient plus de likes ». Pour ce projet, la SAIH a collaboré avec deux jeunes filles à l’origine d’un compte instagram à succès, appelé Barbie Savior, « Barbie la sauveuse » qui a aujourd’hui près de 140 000 followers. Ce compte parodie le même phénomène en postant des photos d’une barbie devant différents décors de savanes, ou de bidonvilles, accompagné de commentaires faussement enthousiastes, une autre manière de dénoncer ce qu’on appelle le tourisme de la pauvreté.

Casser les stéréotypes sur l’Afrique

Mais le projet vise surtout à donner une image plus nuancée du continent africain, et à entamer une réflexion sur le travail des ONG et des volontaires. Aujourd’hui, plus d’un million et demi de personnes font du volontariat chaque année pendant leurs vacances, et dépensent pour cela près de 2 milliards de dollars, ce qui en fait une industrie très lucrative.

La SAIH dit lutter contre une vision naïve de cette aide humanitaire et n’en est pas à son premier projet sur le sujet. L’association est devenue célèbre en 2012 avec une vidéo intitulée « Africa for Norway », l’Afrique pour la Norvège. Alors on y voit, en chanson, de jeunes africains qui se mobilisent pour envoyer des radiateurs en Norvège, pour sauver les Norvégiens du froid dans le cadre d’une fausse campagne appelée Radi Aid. Cette vidéo a eu tellement de succès que chaque année depuis, la SAIH organise les Radi Aid Awards, qui désignent la meilleure, et la pire, vidéo humanitaire de l’année.

Ifri – Institut français des relations internationales – La politique africaine de la France à l’épreuve de la diversité du continent- par Alain ANTIL, directeur du Programme Afrique subsaharienne de l’Ifri.

La présence sur le continent africain est un élément clé de la puissance de la France, ou tout du moins de son influence. Elle a toujours été une priorité de son action extérieure. Pour le demeurer, elle devra s’adapter aux mutations profondes du continent, et à la diversité des dynamiques qui le traversent.

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Sécurité

La France a mené une cinquantaine d’opérations militaires sur le continent africain depuis les indépendances. Après la fin de la guerre froide et à la suite du génocide rwandais, Paris a souhaité ne plus jouer le rôle de « gendarme » de l’Afrique, et a opté pour une triple inflexion de sa politique : intervenir avec de solides mandats internationaux ; tenter de pousser l’Union européenne (UE) à s’impliquer davantage ; et enfin contribuer au renforcement des armées nationales et à l’édification d’une architecture africaine de sécurité. Cette politique a été mise en œuvre au cours des vingt dernières années dans un contexte de réduction du budget de la défense, ce qui s’est traduit par une réduction du nombre de militaires français pré-positionnés en Afrique.

Le premier objectif a été atteint. Le deuxième partiellement : si des pays européens participent aujourd’hui à des opérations de maintien de la paix, leur participation demeure exceptionnelle et légère. Le troisième est loin d’être atteint, ce qui oblige régulièrement la France à intervenir parce qu’elle est la seule à pouvoir le faire, du moins dans les phases initiales du conflit. C’est ainsi que l’on peut interpréter les interventions au Mali (Serval) et en République centrafricaine (Sangaris). Le désengagement français semble impossible, à en juger par la fragilité actuelle de la bande sahélo-saharienne, dont les soubresauts politiques pourraient avoir des conséquences directes sur le Maghreb et le bassin méditerranéen. L’adaptation de l’opération Barkhane, qui regroupe 3 500 militaires, est la clé pour la stabilisation de la bande sahélo-saharienne.

Diplomatie économique

La France est toujours l’un des principaux investisseurs et l’un des plus importants partenaires commerciaux du continent. Ses parts de marché diminuent en raison de l’émergence de concurrents africains et non africains. Si les grands groupes français sont bien armés pour maintenir ou conquérir des marchés, les PME/PMI françaises sont en revanche beaucoup moins outillées et soutenues. Le continent africain représente des marchés en croissance pour lesquels l’appareil industriel français dispose d’atouts (BTP, réseaux d’eau, transports, etc.). Parallèlement, la contribution de la France à la sécurité du continent constitue un utile soutien à sa diplomatie économique. Cependant, trop d’initiatives et de structures, parfois concurrentes, sont censées défendre les intérêts français. Cette surabondance nuit à l’efficacité d’ensemble de cette diplomatie économique. L’échec de l’initiative « Énergies pour l’Afrique » est une illustration de cette politique en ordre dispersé.

Francophonie

Bien que leader naturel de la francophonie, la France apparaît souvent en marge des institutions francophones et ne semble pas en faire un axe cardinal de sa politique étrangère. Se jouent pourtant autour de la francophonie des enjeux d’influence liés au droit, au commerce, aux organisations internationales, ou encore à la diffusion des œuvres culturelles. De plus, compte tenu des évolutions démographiques des pays francophones d’Afrique, le français pourrait gagner des centaines de millions de locuteurs au cours du xxie siècle. Cette évolution est théorique, car si la France ne se réengage pas davantage dans la coopération (envoi de professeurs, soutien aux institutions scolaires, etc.), cette progression de la langue française ne se concrétisera pas. La francophonie pourrait être également utilisée comme levier de promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, objectif plus facile à promouvoir dans ce cadre que dans une relation bilatérale, où chaque recommandation peut être dénoncée comme une atteinte à la souveraineté. Le soutien prolongé à des régimes autoritaires, pour des raisons sécuritaires ou économiques, a terni l’image de la France auprès des populations jeunes de ces pays qui seront peut-être les élites de demain et pourraient alors se détourner d’une relation privilégiée avec Paris.

Aide au développement et à la bonne gouvernance

L’Afrique a une population jeune qui peine à s’insérer dans des marchés de l’emploi incapables d’absorber la masse des nouveaux entrants. Cette jeunesse est porteuse de potentialités : elle tente de se trouver une place dans les sociétés africaines, notamment en créant des mouvements citoyens pour réclamer le respect des droits politiques mais aussi économiques. Parallèlement, cette jeunesse est également porteuse de tensions si des emplois ne sont pas massivement créés. La coopération et l’aide au développement françaises sont des éléments d’influence (soft power) mais doivent intégrer davantage ces enjeux (création d’emplois et respect des droits civiques). Cela passe aussi par une attention accrue aux évaporations de l’aide observées dans certains pays récipiendaires.

Au moment ou le Président est en Afrique et s’exprime en toute lucidité sur nos rapports avec ce grand continent. J’ai jugé bon de partager cette étude qui ne s’arrête pas à un mot sorti de son contexte, qui sert de défouloir et permet à certains qui ont miné l’action de l’ancien Président, de s’émouvoir aujourd’hui. Oui, l’Afrique est partout et la France aussi dans ce nouveau monde.

Pascal Lamy: «Maurice a régressé en termes de sécurité intérieure…»

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Dans un entretien exclusif à L’express Maurice, Pascal Lamy, membre du board de la fondation Mo Ibrahim, confie que même si Maurice est une référence en matière de bonne gouvernance, une dégradation de certains critères liés à celle-ci a été notée, dont l’État de droit.

Il explique que le recours aux réseaux sociaux pour rendre publics les résultats de son 11e indice de la fondation Mo Ibrahim est lié au fait que la problématique de la bonne gouvernance en Afrique est d’un intérêt capital pour sa population, dont 50 % sont constitués de jeunes de 26 ans. Ainsi, la fondation a voulu intéresser les jeunes à ces sujets, il n’y a pas de meilleures plateformes que les réseaux sociaux auxquels s’adonnent massivement les jeunes d’aujourd’hui.

Il a aussi fait état de la particularité de cet indice par rapport à ceux produits par d’autres  institutions comme Transparency International ou Ease of Doing of Business de la Banque mondiale dans la mesure où Mo Ibrahim est un indice composite comptant une centaine d’indicateurs issus de 36 institutions recueillant des données indépendantes d’Afrique et du monde entier. L’indice couvre des indicateurs liés à l’organisation des élections, à l’accès à la justice et à l’emploi ainsi qu’au système de l’éducation en général.

À bien des égards, l’indice Mo Ibrahim demeure un outil d’analyse très riche, publié à partir de sources d’informations publiques vérifiées.  Cette édition de 2017 démontre l’évolution de la gouvernance globale sur le long terme en Afrique, soit la période couvrant 2007 à 2016, ainsi, la trajectoire de bonne gouvernance a connu un net ralentissement au cours de la seconde partie de la décennie.

Il fait remarquer que Maurice,  tout en restant une référence en Afrique en matière de bonne gouvernance, avec sa démocratie vivante et son système politique. Ce qui explique sa position de lauréat dans le continent, sur d’autres critères, il y a eu une dégradation, notamment la sécurité intérieure, l’État de droit ou encore l’égalité économique. Pour remédier à cette  régression constatée dans certains critères, il invite le pays à se mettre au travail pour améliorer sa performance.

Pour Monsieur Lamy, l’économie mondiale va bien. La crise de 2008 a purgé le système en introduisant davantage de régulation du secteur financier. Des risques moins forts qu’avant subsistent dans le secteur financier. Il est préoccupé par la politique et particulièrement de  l’Amérique de Donald Trump  qui a favorise des tensions géopolitiques à l’échelle mondiale.

Pascal Lamy  un Européen engagé

Énarque, Pascal Lamy a servi en tant que directeur de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) pendant 8 ans. Par la suite, en 2013, il a entamé une carrière de consultant auprès de nombreuses institutions internationales. Il est connu à Maurice comme étant celui qui a fait tomber Jayen Cuttaree qui était aussi candidat au poste de . directeur de l’OMC, en 2005. Âgé de 70 ans, l’ex-commissaire européen a été conseiller de l’ancien ministre de l’Économie et des finances, Jacques Delors, après l’avènement de la gauche en 1981.

Indice: au 1er rang en gouvernance globale

La fondation Mo Ibrahim, basée à Dakar, a publié, lundi, l’indice 2017 Mo Ibrahim de la gouvernance en Afrique. Celui-ci indique que Maurice, avec un score de 81,4 sur 100, se classe au 1er rang en Afrique en gouvernance globale. Le pays devance ainsi 54 pays. Son meilleur score est dans le développement humain (86,1) et son score le plus faible est en participation et droits humains (77,5). Selon le rapport, Maurice a atteint un score supérieur à la moyenne africaine (50,8) et à la moyenne régionale pour l’Afrique australe (58,6). Cependant, Maurice reste mauvais élève dans d’autres catégories, dont la corruption dans les services gouvernementaux et la création d’emplois.

Banque mondiale – Pourquoi faut-il à tout prix comprendre les conséquences du changement climatique sur la pêche en Afrique et agir rapidement ?- Soumis par MAGDA LOVEI

Banque mondiale – Quel avenir énergétique face à la rareté de l’eau ?

Quel avenir énergétique face à la rareté de l'eau  1.png

LES POINTS MARQUANTS :

  1. L’eau et l’énergie sont deux secteurs inextricablement liés et interdépendants.
  2. Alors que ces deux ressources font l’objet d’une hausse de la demande mondiale, la pénurie d’eau menace la viabilité à long terme des projets énergétiques, avec de graves conséquences pour le développement.
  3.  Face à un avenir incertain, la Banque mondiale lance une initiative mondiale dont l’objectif est d’aider les pays à s’y préparer dès à présent.  Il s’agit de mesurer les compromis eau/énergie et d’identifier les synergies possibles entre les politiques de gestion de ces deux ressources.

La sécurité énergétique et la sécurité hydrique occupent une place capitale dans le développement humain et économique. Ces deux ressources sont aujourd’hui plus interdépendantes que jamais. Qu’il s’agisse de l’hydroélectricité, bien sûr, mais aussi du refroidissement des centrales thermiques ou encore de l’extraction et de la transformation des combustibles, la quasi-totalité des procédés de production d’énergie exige d’importantes quantités d’eau. Inversement, le pompage, le traitement et le transport de l’eau nécessitent de l’énergie, principalement sous forme d’électricité. Le couple eau/énergie est par ailleurs indispensable à la production agricole, où il est notamment nécessaire à la culture des biocarburants qui permettront à leur tour de produire de l’énergie.

Or, les ressources énergétiques et les ressources en eau sont soumises à des pressions sans précédent, et font l’objet d’une concurrence croissante de la part des populations, des industries, des écosystèmes et des économies en pleine expansion. Quand la population mondiale atteindra les 9 milliards d’habitants, la production agricole devra avoir augmenté de 50 % tandis que les prélèvements d’eau, déjà mis à rude épreuve, devront s’accroître de 15 %. D’ici 2035, la consommation énergétique mondiale augmentera de 35 %, ce qui déterminera une hausse de 15 % de l’utilisation d’eau, tandis que la consommation d’eau du secteur énergétique augmentera de 85 % selon les projections de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).

Le changement climatique viendra ajouter davantage d’incertitude à cette situation en provoquant une variabilité accrue des disponibilités d’eau et une intensification de la fréquence et de la gravité des inondations et des sécheresses. À mesure que les températures augmentent, les fleuves et les lacs où les centrales électriques puisent l’eau nécessaire au refroidissement de leurs systèmes se réchauffent eux aussi, ce qui rendra la production d’électricité de plus en plus difficile au cours des décennies à venir.

Les risques pour le secteur de l’énergie

Dans le monde entier, les pénuries d’eau pèsent déjà sur la viabilité à long terme des projets énergétiques. Pour la seule année écoulée, les pénuries d’eau ont provoqué la fermeture de centrales thermiques en Inde, fait chuter la production énergétique des centrales aux États-Unis et menacé la production hydroélectrique de nombreux pays, dont le Sri Lanka, la Chine et le Brésil.
Près de 93 % des réserves pétrolières souterraines du Moyen-Orient sont exposés à un niveau de risque hydrique moyen ou élevé. Les pays en développement sont les plus vulnérables, car ils ont rarement les capacités nécessaires pour répondre à la forte progression des besoins.
En dépit de ce contexte inquiétant, la planification et la gestion de la production énergétique prennent aujourd’hui rarement en considération les problèmes que pose et posera de plus en plus l’approvisionnement en eau, pas plus d’ailleurs qu’elles n’intègrent les risques de phénomènes extrêmes.

Comme l’explique la directrice exécutive de l’AIE, Maria van der Hoeven, « les planificateurs et les décideurs des deux secteurs sont souvent mal informés des facteurs qui sous-tendent ces enjeux, des moyens d’y faire face et des avantages respectifs des différentes solutions envisageables sur le plan technique et politique ainsi que sur celui de la gestion et de la gouvernance ». Or, prévient-elle, « l’absence d’une planification intégrée entre les deux secteurs n’est pas viable du point de vue socioéconomique ».

En matière d’investissements énergétiques, le défaut d’évaluation des besoins en eau et d’analyse des contraintes hydriques futures a pour conséquence une hausse des coûts et des risques. De fait, l’approvisionnement en eau est considéré comme un risque important pour la plupart des compagnies d’énergie et d’électricité, qui sont nombreuses à faire état de retombées négatives sur leur activité.

Des solutions à la mesure de la complexité des enjeux

Plusieurs solutions existent pour s’attaquer au double défi de l’eau et de l’énergie, et de nombreux pays ont déjà pris l’initiative d’engager des mesures audacieuses. Les Émirats arabes unis, par exemple, s’emploient à diversifier leur panier énergétique en favorisant les énergies propres au détriment du gaz naturel. Le gouvernement a l’intention de construire la plus grande usine mondiale de dessalement solaire qui aura une capacité de traitement journalière de plus de 83,3 millions de litres d’eau potable et produira 20 mégawatts d’électricité. Les Émirats arabes unis, qui abritent déjà la plus grande centrale et station de dessalement du monde, montrent ainsi comment l’on peut trouver des solutions intégrées au double défi de l’eau et de l’énergie.

Les pays peuvent également réduire leur dépendance hydrique en installant d’autres systèmes de refroidissement dans les centrales thermiques, en étudiant les possibilités de traitement des eaux saumâtres et salines, en améliorant l’efficacité des centrales électriques et en remplaçant celles qui sont anciennes et peu performantes. Par ailleurs, on sait aussi que les centrales hydroélectriques au fil de l’eau sont, par rapport à celles alimentées par un réservoir, davantage à même de gérer les variations hydrologiques d’origine climatique.

Ces solutions sont néanmoins tributaires de nombreux facteurs, dont la technologie, l’environnement et les aspects financiers, sans compter qu’elles doivent tenir compte des spécificités propres aux sites concernés. Une bonne intégration des secteurs de l’énergie et de l’eau, au niveau de la planification et des décisions d’investissement, permet d’aborder convenablement toutes les complexités que pose ce double enjeu.

Une dynamique à enclencher

Face à ce défi, et afin de limiter les risques qui en découlent, la Banque mondiale a lancé une nouvelle initiative baptisée thirsty energy (« l’énergie a soif ») et dont l’inauguration officielle a eu lieu cette semaine à Abou Dhabi (Émirats arabes unis), à l’occasion du Sommet mondial des énergies du futur.

Cette initiative vise à aider les gouvernements à se préparer pour un avenir incertain et à dépasser les cloisonnements qui font obstacle à une planification intersectorielle. Il s’agit de mesurer les compromis entre la gestion des ressources hydriques et celle des ressources énergétiques, et d’identifier les synergies possibles.

L’un des atouts majeurs de cette initiative réside dans le fait qu’elle prend le secteur de l’énergie comme point de départ pour promouvoir le dialogue, mettre au point des solutions et ajuster les approches en fonction des ressources disponibles et des réalités institutionnelles et politiques du pays concerné.

L’initiative montre l’utilité d’une gestion conjuguée de l’énergie et de l’eau au moyen de travaux réalisés à la demande d’un certain nombre de pays. Illustrant ainsi comment on peut favoriser un développement durable grâce à des outils opérationnels de gestion des ressources fondés sur des données factuelles, elle produit des connaissances qui pourront être partagées à plus grande échelle avec d’autres pays confrontés à des problèmes analogues.

La Banque mondiale met en garde contre une « crise de l’apprentissage » dans l’éducation mondiale

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Le Rapport sur le développement dans le monde 2018 appelle à mettre davantage l’accent sur les évaluations et à fonder l’action sur des données factuelles

Dans les pays à revenu faible et intermédiaire, des millions de jeunes élèves courent le risque de rater des opportunités et de percevoir de bas salaires plus tard dans la vie parce que leurs écoles primaires et secondaires ne parviennent pas à leur donner l’éducation dont ils ont besoin pour réussir. Mettant en garde contre une « crise de l’apprentissage » dans l’éducation mondiale, un nouveau rapport de la Banque mondiale soutient que sans apprentissage, la scolarisation n’est pas seulement une occasion manquée, elle est également une grosse injustice pour les enfants et les jeunes du monde entier.

Le Rapport sur le développement dans le monde 2018 : « Apprendre pour réaliser la promesse de l’éducation » (ou WDR 2018fait valoir que sans apprentissage, l’éducation ne pourra pas réaliser sa promesse d’élimination de la pauvreté et de promotion des mêmes chances et d’une prospérité partagée pour tous. Même après avoir passé plusieurs années sur les bancs de l’école, des millions d’enfants ne peuvent ni lire, ni écrire, ni effectuer des opérations de mathématiques élémentaires. Cette crise de l’apprentissage élargit les disparités sociales au lieu de les rétrécir. Les jeunes élèves déjà défavorisés par la pauvreté, les conflits, leur genre ou un handicap entrent dans la vie adulte sans avoir acquis ne seraient-ce que les compétences de base.

Pour le président du Groupe de la Banque mondiale Jim Yong Kim, « cette crise de l’apprentissage est d’ordre moral et économique. Lorsqu’elle est fournie de manière satisfaisante, l’éducation fait entrevoir la perspective d’un emploi, de meilleurs revenus et d’une existence en bonne santé et à l’abri de la pauvreté pour les jeunes. Pour la communauté, elle stimule l’innovation, renforce les institutions et consolide la cohésion sociale. Mais ces bienfaits dépendent des connaissances acquises ; et sans apprentissage, la scolarisation est une occasion manquée. Pire encore, elle est une grosse injustice : les enfants les plus défavorisés de la société sont ceux qui ont le plus besoin d’une bonne éducation pour réussir dans la vie ».

Le rapport recommande des mesures concrètes pour aider les pays en développement à résoudre cette terrible crise de l’apprentissage en renforçant les évaluations des acquis scolaires ; en s’appuyant sur les données concernant ce qui marche et ce qui ne marche pas pour orienter les décisions dans le domaine de l’éducation ; et en impulsant une forte dynamique sociale dans le but de susciter une réforme visant à mettre l’objectif « d’apprentissage pour tous » au centre de l’éducation.

Selon le rapport, lorsqu’on a demandé récemment à des élèves de troisième année du primaire au Kenya, en Tanzanie et en Ouganda de lire en anglais ou en swahili une phrase du genre « le nom du chien est Fido », trois quarts n’ont pas compris ce que cela voulait dire. Dans les campagnes indiennes, près de trois quarts des élèves de troisième année du primaire n’ont pas pu faire une opération de soustraction à deux chiffres comme dans « 46 – 17 ». En cinquième année du primaire, la moitié en était toujours incapable. Bien que les compétences des Brésiliens âgés de 15 ans se soient améliorées, vu leur rythme actuel d’évolution, ils n’atteindront pas la note moyenne en mathématiques des pays riches avant 75 ans, et il leur faudra 263 ans pour la lecture.

Encore que ces chiffres ne tiennent pas compte des 260 millions d’enfants qui, du fait de conflits, de discriminations, de handicaps et d’autres obstacles, ne sont inscrits ni dans le primaire ni dans le secondaire.

Bien que tous les pays en développement n’affichent pas des résultats aussi déprimants, beaucoup sont largement à la traine de ce qu’ils ambitionnent. Des évaluations internationales de référence en matière de lecture, de calcul et d’écriture révèlent que les notes de l’élève moyen d’un pays pauvre sont inférieures à celles de 95 % des élèves de pays à revenu élevé — ce qui signifie qu’un tel élève serait admis à un programme de remise à niveau dans un pays à revenu élevé. De nombreux élèves affichant d’excellentes performances dans certains pays à revenu intermédiaire — garçons et filles se classant dans le quartile supérieur de leur cohorte — se retrouveraient dans le quartile inférieur des élèves d’un pays plus riche.

Rédigé par une équipe dirigée par Deon Filmer et Halsey Rogers, économistes principaux à la Banque mondiale, ce rapport pointe les éléments déterminants du déficit d’apprentissage en faisant ressortir non seulement les manifestations de la rupture entre l’enseignement et l’apprentissage dans un trop grand nombre d’établissements scolaires, mais aussi les facteurs politiques plus profonds qui font perdurer cette situation.

Il est possible de réaliser des progrès importants

Le rapport révèle que lorsque « l’apprentissage pour tous » devient une priorité pour les pays et leurs dirigeants, on peut améliorer considérablement les normes en matière d’éducation. À titre d’illustration, la Corée du Sud est parvenue en 1995 à une scolarisation universelle dans un système d’enseignement de qualité jusqu’au secondaire – ses jeunes étant classés au plus haut niveau par les évaluations internationales des performances scolaires – alors qu’elle était déchirée par la guerre et avait un très faible taux d’alphabétisation au début des années 50. Les résultats du Viet Nam à un test de suivi des acquis des élèves du second cycle du secondaire en mathématiques, science et lecture de l’OCDE (dénommé PISA) réalisé en 2012 ont montré que ses jeunes de 15 ans avaient le même niveau que ceux d’Allemagne, alors même que le Viet Nam est un pays nettement plus pauvre.

Grâce à une action concertée des pouvoirs publics, le Pérou a enregistré l’un des taux de croissance les plus rapides des résultats scolaires globaux entre 2009 et 2015. Dans plusieurs pays comme le Libéria, la Papouasie-Nouvelle-Guinée et Tonga, la lecture dans les premières classes du primaire s’est considérablement améliorée en un temps record moyennant des actions ciblées reposant sur des données factuelles et des preuves solides.

« Le seul moyen de faire des progrès est de “rechercher la vérité à partir des faits”. Si nous nous y employons, nous trouverons que les faits concernant l’éducation révèlent une triste réalité. Pour un trop grand nombre d’enfants, scolarisation n’est pas synonyme d’apprentissage », déclare l’économiste en chef de la Banque mondiale, Paul Romer.

S’appuyant sur des données factuelles et des conseils recueillis durant des consultations approfondies menées dans 20 pays et associant des représentants de l’administration, d’organismes d’aide au développement, d’instituts de recherche, d’OSC et du secteur privé, le rapport énonce trois approches stratégiques :

Premièrement : apprécier les acquis pour faire de l’apprentissage un objectif sérieux.

Seule la moitié des pays dispose de critères d’appréciation permettant d’évaluer les acquis à la fin du primaire et du premier cycle du secondaire. Des évaluations bien conçues peuvent aider les enseignants à orienter les élèves, améliorer la gestion du système et amener la société à s’intéresser à l’apprentissage. Ces évaluations sont de nature à éclairer les choix stratégiques, mesurer les progrès et identifier les enfants à la traine.

Deuxièmement : mettre l’école au service de l’ensemble des apprenants.

Uniformiser les règles du jeu en réduisant le retard de croissance et en favorisant le développement des fonctions cérébrales par la nutrition et la stimulation précoces afin que les enfants soient disposés à apprendre au moment où ils commencent l’école. Attirer des talents dans l’enseignement et entretenir leur motivation en offrant aux enseignants une formation adaptée qui est renforcée par le concours de mentors. Déployer des technologies qui permettent aux enseignants d’enseigner en tenant compte du niveau de l’élève et renforcer les capacités de gestion des établissements scolaires, notamment celles des directeurs d’école.

Troisièmement, mobiliser tous ceux qui ont un intérêt dans l’apprentissage.

Recourir à l’information et aux indicateurs pour mobiliser les citoyens, accroître l’éthique de responsabilité et créer une volonté politique en faveur de la réforme de l’éducation. Associer les parties concernées, y compris les milieux d’affaires, à toutes les étapes de la réforme, de sa conception à sa mise en œuvre.

« Les pays en développement sont loin du niveau auquel ils devraient se trouver en matière d’apprentissage. Beaucoup n’y consacrent pas suffisamment de moyens financiers, et la majeure partie doit investir plus efficacement. Mais il ne s’agit pas simplement d’argent : les pays doivent aussi investir dans les capacités des institutions et des individus chargés d’éduquer nos enfants », affirme Jaime Saavedra, un ancien ministre de l’Éducation au Pérou désormais directeur principal pour l’éducation à la Banque mondiale. « Une réforme de l’éducation est nécessaire d’urgence et demande de la persévérance et un alignement politique de la part des pouvoirs publics, des médias, des entrepreneurs, des enseignants, des parents et des élèves. Tous doivent valoriser et exiger un apprentissage de meilleure qualité. »

Ifri Paris-Bruxelles – La politique africaine de la France à l’épreuve de la diversité du continent – par Alain ANTIL, directeur du Programme Afrique subsaharienne de l’Ifri.

La présence sur le continent africain est un élément clé de la puissance de la France, ou tout du moins de son influence. Elle a toujours été une priorité de son action extérieure. Pour le demeurer, elle devra s’adapter aux mutations profondes du continent, et à la diversité des dynamiques qui le traversent.

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Sécurité

La France a mené une cinquantaine d’opérations militaires sur le continent africain depuis les indépendances. Après la fin de la guerre froide et à la suite du génocide rwandais, Paris a souhaité ne plus jouer le rôle de « gendarme » de l’Afrique, et a opté pour une triple inflexion de sa politique : intervenir avec de solides mandats internationaux ; tenter de pousser l’Union européenne (UE) à s’impliquer davantage ; et enfin contribuer au renforcement des armées nationales et à l’édification d’une architecture africaine de sécurité. Cette politique a été mise en œuvre au cours des vingt dernières années dans un contexte de réduction du budget de la défense, ce qui s’est traduit par une réduction du nombre de militaires français pré-positionnés en Afrique.

Le premier objectif a été atteint. Le deuxième partiellement : si des pays européens participent aujourd’hui à des opérations de maintien de la paix, leur participation demeure exceptionnelle et légère. Le troisième est loin d’être atteint, ce qui oblige régulièrement la France à intervenir parce qu’elle est la seule à pouvoir le faire, du moins dans les phases initiales du conflit. C’est ainsi que l’on peut interpréter les interventions au Mali (Serval) et en République centrafricaine (Sangaris). Le désengagement français semble impossible, à en juger par la fragilité actuelle de la bande sahélo-saharienne, dont les soubresauts politiques pourraient avoir des conséquences directes sur le Maghreb et le bassin méditerranéen. L’adaptation de l’opération Barkhane, qui regroupe 3 500 militaires, est la clé pour la stabilisation de la bande sahélo-saharienne.

Diplomatie économique

La France est toujours l’un des principaux investisseurs et l’un des plus importants partenaires commerciaux du continent. Ses parts de marché diminuent en raison de l’émergence de concurrents africains et non africains. Si les grands groupes français sont bien armés pour maintenir ou conquérir des marchés, les PME/PMI françaises sont en revanche beaucoup moins outillées et soutenues. Le continent africain représente des marchés en croissance pour lesquels l’appareil industriel français dispose d’atouts (BTP, réseaux d’eau, transports, etc.). Parallèlement, la contribution de la France à la sécurité du continent constitue un utile soutien à sa diplomatie économique. Cependant, trop d’initiatives et de structures, parfois concurrentes, sont censées défendre les intérêts français. Cette surabondance nuit à l’efficacité d’ensemble de cette diplomatie économique. L’échec de l’initiative « Énergies pour l’Afrique » est une illustration de cette politique en ordre dispersé.

Francophonie

Bien que leader naturel de la francophonie, la France apparaît souvent en marge des institutions francophones et ne semble pas en faire un axe cardinal de sa politique étrangère. Se jouent pourtant autour de la francophonie des enjeux d’influence liés au droit, au commerce, aux organisations internationales, ou encore à la diffusion des œuvres culturelles. De plus, compte tenu des évolutions démographiques des pays francophones d’Afrique, le français pourrait gagner des centaines de millions de locuteurs au cours du xxie siècle. Cette évolution est théorique, car si la France ne se réengage pas davantage dans la coopération (envoi de professeurs, soutien aux institutions scolaires, etc.), cette progression de la langue française ne se concrétisera pas. La francophonie pourrait être également utilisée comme levier de promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, objectif plus facile à promouvoir dans ce cadre que dans une relation bilatérale, où chaque recommandation peut être dénoncée comme une atteinte à la souveraineté. Le soutien prolongé à des régimes autoritaires, pour des raisons sécuritaires ou économiques, a terni l’image de la France auprès des populations jeunes de ces pays qui seront peut-être les élites de demain et pourraient alors se détourner d’une relation privilégiée avec Paris.

Aide au développement et à la bonne gouvernance

L’Afrique a une population jeune qui peine à s’insérer dans des marchés de l’emploi incapables d’absorber la masse des nouveaux entrants. Cette jeunesse est porteuse de potentialités : elle tente de se trouver une place dans les sociétés africaines, notamment en créant des mouvements citoyens pour réclamer le respect des droits politiques mais aussi économiques. Parallèlement, cette jeunesse est également porteuse de tensions si des emplois ne sont pas massivement créés. La coopération et l’aide au développement françaises sont des éléments d’influence (soft power) mais doivent intégrer davantage ces enjeux (création d’emplois et respect des droits civiques). Cela passe aussi par une attention accrue aux évaporations de l’aide observées dans certains pays récipiendaires.

La Banque mondiale – La révolution technologique qui transforme la collecte de données sur la pauvreté.

Le monde s’est fixé un objectif très ambitieux : mettre fin à l’extrême pauvreté d’ici 2030. Or, sans données fiables sur la pauvreté, il est impossible de savoir si nous progressons, ou si les efforts déployés bénéficient à ceux qui en ont le plus besoin.

Les pays – souvent en collaboration avec le Groupe de la Banque mondiale ou d’autres organisations – mesurent la pauvreté et le bien-être des populations en menant des enquêtes directement auprès des ménages. Ces enquêtes aident à mieux comprendre les modes de vie des communautés les plus démunies, à savoir dans quelles conditions celles-ci vivent et à quels obstacles elles sont confrontées. Toutefois, les méthodes employées pour mener ces enquêtes, qui ont longtemps reposé sur le simple usage du duo papier-stylo, restaient très rudimentaires.
Les nouvelles technologies sont en train de révolutionner la collecte d’informations, et pour la Banque mondiale, c’est l’occasion de produire plus de données, de meilleure qualité.
Il n’y a pas si longtemps, les enquêteurs des instituts nationaux de statistique parcouraient leur pays en posant à des échantillons de populations une variété de questions, munis d’un questionnaire papier sur lequel ils inscrivaient les réponses. Certaines retranscriptions pouvaient être extrêmement soignées, d’autres l’étaient moins. Les notes manuscrites étaient par la suite saisies dans un système informatique. Les données faisaient alors l’objet de différents calculs, et l’on en déduisait le taux de pauvreté d’un pays.
À l’évidence, cette méthode avait ses failles. Outre les éventuelles erreurs humaines lors de l’enquête, le transfert des données depuis les questionnaires papier vers le système informatique faisait augmenter le risque d’effectuer des erreurs de saisie.
De nos jours, la technologie contribue à améliorer la qualité des données, sans modifier le processus de collecte. Les enquêteurs continuent de se rendre dans les villes et les villages du pays, mais, désormais, ils sont équipés de tablettes numériques. Ces tablettes synchronisent en temps réel les résultats des sondages dans un système centralisé, et sont munies d’une balise GPS pour vérifier que les enquêteurs se rendent au bon endroit, et qu’ils interrogent les bonnes personnes. Ces nouveautés technologiques ont ainsi permis de réduire le taux d’erreur et de rationaliser le processus.
Par ailleurs, lorsque les enquêteurs (que l’on appelle aussi recenseurs) ne peuvent pas se rendre dans certaines régions, ou lorsqu’un pays a besoin de collecter des données sur la pauvreté et le bien-être de manière plus fréquentes et en temps réel, on privilégie aujourd’hui les téléphones portables. Les enquêtes téléphoniques permettent d’interroger un échantillon assez vaste de personnes et de mieux comprendre leurs conditions de vie. Cette méthode affiche en effet le meilleur rapport coût-efficacité : les enquêtes menées grâce aux téléphones portables sont fiables, et viennent compléter les questionnaires collectés directement auprès des ménages. Dans certains cas, c’est par ce biais que les pouvoirs publics contactent les populations et répondent à leurs besoins lors d’une crise, d’un conflit, d’un choc économique, ou de toute autre situation qui rendrait la collecte de données extrêmement difficile, ou lorsqu’il est crucial de pouvoir communiquer immédiatement des informations.
« On peut mettre à profit la technologie de trois manières différentes », explique Utz Pape, économiste à la Banque mondiale. « On peut s’en servir pour améliorer la qualité des enquêtes existantes, pour accroître la fréquence des enquêtes et compléter les enquêtes traditionnelles auprès des ménages, et pour élaborer de nouvelles méthodes afin de collecter des données et, partant, de mieux comprendre les comportements des personnes interrogées. »
En d’autres termes, la technologie transforme la collecte de données, et les chercheurs trouvent sans cesse de nouveaux moyens d’exploiter le potentiel des téléphones portables et des tablettes.
C’est le cas d’une initiative de la Banque mondiale au Soudan du Sud, baptisée Pulse of South Sudan, qui pousse un peu plus loin l’utilisation d’outils technologiques pour la collecte de données. Les enquêteurs, en effet, ont non seulement mené leurs entretiens à l’aide d’une tablette, mais ils ont aussi enregistré un court témoignage des personnes interrogées, afin de rendre compte subjectivement de la situation sur le terrain. Ces témoignages ont servi à mettre un visage sur les données et les statistiques, et donc à disposer d’une image plus complète de la situation dans le pays.
Des données en temps réel grâce aux téléphones portables
Dans de plus en plus de pays, des données sont générées en temps réel par le biais d’enquêtes à haute fréquence qui s’appuient sur la multiplication des téléphones portables dans le monde entier. L’initiative de la Banque mondiale Listening to Africa (L2A) a ainsi mené des enquêtes par téléphone portable — à Madagascar, au Malawi, au Sénégal, en Tanzanie, au Togo et au Mali — pour obtenir régulièrement des informations sur les conditions d’existence des populations. Cette démarche combine des entretiens en face à face suivis d’enquêtes téléphoniques pour obtenir des données permettant d’évaluer le bien-être.
Dans le cadre de cette initiative, on remet à tous les répondants un téléphone portable et un chargeur solaire. De plus, ils disposent tous de suffisamment de crédit téléphonique, ce qui les incite à rester dans le programme. Surveillance d’établissements de santé en Tanzanie , collecte de données sur la fréquence des coupures de courant au Togo : l’initiative L2A a été mise en œuvre dans six pays pour obtenir des données dans de très nombreux domaines.
« La réalisation d’enquêtes par téléphone portable est certes un phénomène nouveau, mais ce sera une méthode très courante d’ici cinq ans », explique Johannes Hoogeveen, économiste principal au sein du Pôle mondial d’expertise en Pauvreté pour la Région Afrique. « La révolution technologique est toute récente. Avec des capacités adaptées et un modèle de financement idoine, les instituts nationaux de statistique peuvent se servir de la technologie pour recueillir toutes les données imaginables afin d’évaluer le niveau de développement. »
D’après Johannes Hoogeveen, cette approche pourrait trouver toute sa place dans des contextes fragiles ou en cas de conflit ou de crise (a) telle qu’une catastrophe naturelle, un épisode de famine ou une pandémie. Ainsi, on recourt à des enquêtes par téléphone portable pour surveiller la flambée du virus Ebola en Afrique de l’Ouest, les inondations à Dar es Salaam, ou les déplacements forcés au Mali.
Johannes Hoogeveen n’en met pas moins en garde : cette approche est nouvelle et, pour qu’elle puisse déployer tout son potentiel, il faut au préalable renforcer les liens avec les politiques adoptées. Ce faisant, des financements supplémentaires pourraient être débloqués afin de mettre en œuvre ces nouveaux outils à plus grande échelle.
L’obtention de données par des moyens technologiques est loin de se limiter à la seule Région Afrique. De fait, cette démarche a été expérimentée très tôt au Pérou et au Honduras dans le cadre du programme Listening 2 LA. En Europe et en Asie centrale, la Banque mondiale a lancé le programme Listening to Tajikistan, afin d’estimer les conséquences du ralentissement de l’économie russe en 2014/2015. À l’origine prévue pour durer six mois, cette initiative est désormais en place depuis 29 mois, et devrait se poursuivre pendant les 12 prochains mois grâce un partenariat avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA). Compte tenu du volume de données, l’équipe travaille actuellement à l’élaboration d’un indice de fragilité pluridimensionnel qui permettrait de mesurer sur une base mensuelle un ensemble d’indicateurs du niveau de bien-être allant de la sécurité alimentaire à la qualité des emplois, en passant par les services publics.
On peut voir la technologie comme une solution nouvelle à un problème ancien », souligne Joao Pedro Azevedo, économiste principal au Pôle mondial d’expertise en Pauvreté de la Banque mondiale et co-responsable de l’initiative Listening to Tajikistan avec William Hutchins Seitz, « mais ce dont nous avons vraiment besoin, c’est de modifier notre approche. Bien souvent, nous ne faisons qu’appliquer la technologie à un cadre de pensée préalable. Par ailleurs, nous devons également nous pencher sur les nouvelles questions qui peuvent – ou devraient – apparaître avec le recours à ces nouvelles méthodes d’enquête, et nous demander comment nous pouvons utiliser ces outils pour suivre les résultats en temps réel. »
Un aperçu du futur
On peut déjà avoir un aperçu de ce qui nous attend : au Tadjikistan, l’équipe du programme installe actuellement dans certains foyers des boîtiers connectés afin d’effectuer un suivi de la consommation d’énergie, l’un des principaux défis à relever pour ce pays. Ces appareils envoient automatiquement, en temps réel, des données sur les coupures de courant, ce qui peut permettre de mesurer la qualité de l’énergie. En outre, l’équipe collabore également avec le service chargé du Big Data au sein de la Banque mondiale, pour mettre au point et valider des algorithmes d’apprentissage automatique en fonction d’informations géo spatiales, telles que la lumière nocturne, et pour mieux comprendre l’origine des coupures de courant, sans se limiter aux 150 lieux dans lesquels les boîtiers connectés ont été installés.
En Somalie, dans le cadre d’un projet pilote, une équipe a déployé quelque 200 balises GPS afin d’étudier les schémas migratoires de populations nomades. Il s’agit de faire en sorte que ces populations soient représentées dans les enquêtes futures, de fournir des éléments d’analyse destinés à définir quand, où, comment et vers quelle destination ils émigrent, ainsi que d’améliorer la prestation de services publics.
D’autres initiatives sont en cours : au Mexique, par exemple, la Banque mondiale et ses partenaires s’appuient sur l’imagerie par satellite (a) et des données d’enquête pour évaluer le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté dans les villes. En Somalie, les images par satellite sont utilisées pour guider les enquêteurs dans le cadre de l’enquête à haute fréquence, ou pour définir un échantillon représentatif. Malgré les innovations apportées par cet usage de la technologie, ces initiatives n’ont pas pour but de remplacer les enquêtes traditionnelles auprès des ménages, qui constituent toujours le principal moyen de mesurer la pauvreté. Bien intégrés, ces outils peuvent toutefois se révéler extrêmement efficaces pour recueillir des données, et donc pour mettre à disposition des décideurs les éléments les plus pertinents.
Alvin Etang Ndip, un économiste qui collabore avec le Pôle mondial d’expertise en Pauvreté de la Banque mondiale et qui dirige l’initiative Listening to Africa, résume très bien l’intérêt des innovations technologiques pour l’obtention de données : « La révolution technologie change notre manière de travailler. En mieux. »

 

La Banque mondiale – La mobilité durable au XXIe siècle – Par Mahmoud Mohieldin et Nancy Vandycke.

Transport

La gestion de la mobilité des personnes et des marchandises est l’un des plus grands défis environnementaux et sociaux actuels. À l’horizon 2030, dans le monde, le transport de voyageurs représentera plus de 80 000 milliards de passagers-kilomètres (soit 50 % de plus qu’aujourd’hui) et le volume de fret augmentera de 70 %.
Alors que l’Inde, la Chine, l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud-Est connaissent une croissance rapide, des milliards de personnes auront de plus fortes exigences en matière de mode de vie, et aspireront à de nouvelles formes de mobilité. Des mégaprojets comme l’initiative One Belt, One Road en Chine permettront de connecter plus de la moitié de la population de la planète au reste du monde et d’acheminer environ un quart de l’ensemble des produits et des services par voie maritime ou terrestre. Et, à l’échelle du globe, le nombre de véhicules circulant sur les routes devrait doubler d’ici à 2050.
L’avenir de la mobilité passe par une politique de long terme centrée sur une approche durable. Pourtant, les transports ne constituent pas un Objectif de développement durable (ODD) à part entière, essentiellement parce que ce secteur n’a pas su parler d’une seule et même voix pour influer sur ce processus mondial. Certains aspects des transports apparaissent néanmoins dans différents ODD (par exemple la sécurité routière et les émissions de carbone) et, au cours des deux dernières années, la communauté internationale a pris plusieurs engagements concernant ce secteur. Ainsi, le transport est l’un des grands axes du programme d’action que les pays en développement enclavés ont adopté d’un commun accord en vue de développer leur infrastructure de transport par voie terrestre. Par ailleurs, la communauté internationale a adopté le Nouvel agenda urbain lors de la conférence Habitat III à Quito, en Équateur, qui souligne l’importance et la nécessité de rendre les systèmes de transport plus durables, de manière à atténuer les problèmes liés à une urbanisation effrénée.
Les transports tiennent également une place essentielle dans le développement économique et social nécessaire à la réalisation des ODD. Par exemple, étant donné que ce secteur est l’un des plus gros consommateurs de combustibles fossiles, il joue un rôle de premier plan dans la mise en œuvre de l’ODD 7 relatif à l’énergie. De même, il revêt une importance stratégique pour la réalisation de l’ODD 9 (bâtir une infrastructure résiliente) et de l’ODD 11 (faire en sorte que les villes et les établissements humains soient durables, ce qui nécessite entre autres d’améliorer la sécurité routière  et de développer les transports en commun). En outre, dans les zones rurales, la desserte routière est largement corrélée à l’incidence de la pauvreté. Il existe aussi un lien étroit entre activités de transport et développement économique.
Le secteur des transports offre la possibilité d’améliorer la vie et les moyens de subsistance de milliards de personnes — leur santé, leur environnement, leur qualité de vie — et de stabiliser le climat. Mais il contribue aujourd’hui aux inégalités d’accès aux opportunités économiques et sociales, à l’augmentation du nombre d’accidents mortels liés au transport, à l’utilisation intensive de combustibles fossiles, aux émissions massives de gaz à effet de serre, ainsi qu’à la pollution atmosphérique et sonore.
Les problèmes sociaux, environnementaux et économiques sont bien identifiés, mais, au niveau mondial, il manque toujours un leadership et un ensemble de principes clairement définis pour transformer le secteur des transports. Il existe un moyen d’aller de l’avant, à condition cependant que toutes les parties prenantes travaillent ensemble.
Premièrement, une approche fragmentée n’est plus possible dans le secteur des transports. Il est temps que ce secteur agisse avec davantage de cohérence et qu’il parle d’une seule voix pour influer sur les processus mondiaux et nationaux. L’approche actuelle, dans laquelle de multiples acteurs (organismes des Nations Unies, banques multilatérales de développement, équipementiers, société civile, etc.) opèrent chacun de leur côté, ne permet pas de mettre en œuvre des politiques et des financements d’une portée suffisante pour transformer la mobilité. Il est toutefois possible de rassembler ces différents acteurs. C’est ce qui a été fait en 2010 dans le secteur de l’énergie, qui a été systématiquement pris en compte dans tous les accords mondiaux portant sur le développement durable. Cela lui a permis de devenir fiable et crédible, et, ainsi, d’attirer des bailleurs de fonds privés et des partenaires pour le financement de son développement.
Deuxièmement, il faut définir clairement les objectifs de la mobilité durable. Or, les ODD ne mentionnent pas de trajectoire précise pour la mobilité, mais plutôt des éléments sur lesquels on peut s’appuyer. Par exemple, ils font référence à l’« accès universel », à la sécurité routière ou à l’efficacité énergétique, et à la nécessité de réduire le nombre de décès dus à la pollution atmosphérique. Partant de là, on peut définir une vision pour la mobilité durable, autour de quatre objectifs mondiaux : 1) l’accès équitable, 2) la sécurité et la sûreté, 3) l’efficacité et 4) la lutte contre la pollution et la capacité de s’adapter au climat. Dans cette vision, la mobilité durable passerait notamment par l’amélioration des infrastructures et des services facilitant la circulation des marchandises et des personnes. On ne pourra y parvenir qu’en s’efforçant d’atteindre simultanément ces quatre objectifs et en recourant à des arbitrages entre chacun d’eux.
Troisièmement, l’évaluation économique des projets de transport devrait être entièrement repensée. Les analyses coûts-avantages traditionnelles de ces projets se concentrent sur la réduction des temps de trajet, une mesure indirecte de l’efficacité. Mais, étant donné les choix opérés, par exemple entre la vitesse et les accidents mortels, le coût des accidents risque d’annuler (a) les gains d’efficience attendus. L’intégration d’autres dimensions relevant d’une approche durable, telles que la sécurité (a), l’écologie ou l’inclusivité, modifiera significativement l’évaluation et, partant, la conception des projets. C’est ce vers quoi il faut tendre. Aucun projet routier, par exemple, ne devrait être financé sans que la sécurité, l’équité et l’impact climatique ne soient dûment pris en compte.
Comment la technologie peut-elle façonner l’avenir de la mobilité, dans laquelle elle jouera un rôle crucial ? À l’horizon 2020, trois régions du monde concentreront une grande partie des connexions et des appareils mobiles : l’Asie/Pacifique, le Moyen-Orient et l’Afrique. L’accroissement du volume de données et de la connectivité peut déboucher sur une mobilité plus efficiente et plus proche des besoins, qui offrira aux pays en développement des opportunités considérables pour opérer un bond technologique en adoptant directement des techniques et des pratiques innovantes. Par exemple, les nouveaux systèmes analytiques, l’automatisation et l’Internet des objets sont déjà extrêmement prometteurs pour réduire la consommation, et notamment la consommation d’énergie. Dans nombre de métropoles, les services de mobilité supplémentaires qui sont accessibles via un smartphone entraînent déjà un développement de l’usage partagé des véhicules, à mesure que se généralisent les services reposant sur la technologie, comme le covoiturage ou le transport à la demande. Les véhicules connectés et autonomes pourraient contribuer à optimiser l’utilisation des routes et, ainsi, limiter les coûts d’extension des infrastructures routières, avec, à la clé, des économies se chiffrant en milliards.
Il est néanmoins impératif de soupeser les risques et les avantages potentiels de ces nouvelles technologies. Dans un avenir proche, alors que la mobilité reste encore centrée sur la voiture, les villes risquent d’être complètement embouteillées. Il se pourrait aussi que les recettes fiscales pour l’entretien des routes viennent à manquer, et que, par ailleurs, l’automatisation fasse disparaître de nombreux emplois. Alors que, jusqu’ici, les pouvoirs publics ont cherché en priorité des solutions pour améliorer la mobilité et passer à des modes de transport collectif, ils vont désormais devoir prendre des mesures pour éviter, grâce à la technologie, les mouvements inutiles de personnes et de marchandises.

Sur l’ensemble de la planète, le Groupe de la Banque mondiale aide le secteur des transports à mettre en œuvre des politiques et des financements s’inscrivant dans une vision commune de la mobilité durable. Par le biais de la plateforme sur la mobilité durable pour tous, il a réuni un groupe de haut niveau composé de divers acteurs des transports qui s’attachent à transformer la mobilité : banques multilatérales de développement, organismes des Nations Unies, pays donateurs, organisations non gouvernementales, société civile mondiale et universitaires. Ces partenaires se rassembleront autour d’une vision commune, avec des objectifs clairement définis, ils concevront un mécanisme de reddition de comptes pour le secteur des transports, incluant des indicateurs mesurant les avancées, et ils élaboreront un programme d’action et un plan de financement pour faire entrer les transports dans une ère nouvelle. Les opérations de prêt du Groupe de la Banque mondiale au profit des transports intègrent déjà cette vision de la mobilité durable. En outre, le nouveau Cadre environnemental et social  de la Banque impose que la conception de tous les nouveaux projets de transport s’appuie sur une évaluation de la sécurité.
Il est crucial que le transport fasse partie intégrante de la conversation mondiale sur la réalisation des ODD. Ce mois-ci, les pays se réuniront au siège des Nations Unies pour le deuxième Forum politique de haut niveau sur le développement durable , où ils discuteront de la mise en œuvre des ODD au niveau national. Lors de ce forum, le Groupe de la Banque mondiale et le Département des affaires économiques et sociales des Nations Unies inviteront un large éventail d’acteurs à donner leur avis sur la version préliminaire du rapport consacré à la mobilité mondiale. Ce rapport constitue la toute première tentative d’examen des performances des transports dans le monde, et de la capacité de ce secteur à soutenir le développement durable. Le rapport final sera publié en octobre.
Grâce à leur expertise, tous ces acteurs partenaires peuvent permettre une transformation positive du secteur des transports. En travaillant ensemble, ils pourront dessiner l’avenir de la mobilité, tout en veillant à ce que tous les ODD aillent dans la bonne direction, c’est-à-dire contribuent à mettre fin à la pauvreté et à promouvoir une prospérité partagée.

Les auteurs.

Mahmoud Mohieldin, premier vice-président pour le Programme de développement à l’horizon 2030, Relations avec les Nations Unies et Partenariats, Groupe de la Banque mondiale

Nancy Vandycke, économiste principale et conseillère économique, Pôle mondial d’expertise en Transports et TIC, Groupe de la Banque mondiale.

LES POINTS MARQUANTS

  • À l’horizon 2030, dans le monde, le transport de voyageurs représentera plus de 80.000 milliards de passagers-kilomètres (soit 50 % de plus qu’aujourd’hui) et le volume de fret augmentera de 70 %.
  • Le nombre de véhicules circulant sur les routes devrait doubler d’ici à 2050.
  • Alors que l’Inde, la Chine, l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud-Est connaissent une croissance rapide, des milliards de personnes auront de plus fortes exigences en matière de mode de vie, et aspireront à de nouvelles formes de mobilité.

Un questionnement

Le projet de métro léger de l’Ile Maurice, intègre-t-il toutes ses considérations (1) l’accès équitable, 2) la sécurité et la sûreté, 3) l’efficacité et celles liées à l’économie durable ( la lutte contre la pollution et la capacité de s’adapter au climat)  ?

 

 

La crise financière du Mozambique. Un pays modèle remis en cause. – Note de Tristan Coloma et Leslie Fauvel de l’Ifri, juillet 2017.

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Avec une décennie de croissance économique supérieure à 7 % par an en moyenne et un régime stable dominé par un seul parti (le Front de libération du Mozambique, Frelimo) depuis la fin de la guerre civile en 1992, le Mozambique était présenté jusqu’à une date récente comme un des succès économiques du continent africain.

La politique néolibérale a semblé porter ses fruits au début du XXIe siècle et a même été renforcée par le destin avec la découverte d’énormes réserves de gaz au large des côtes mozambicaines (5,6 trillions de mètres cubes) au tournant des années 2010. La dynamique de l’économie mozambicaine devait être considérablement amplifiée par cette nouvelle source de richesse et le pays était présenté comme un nouvel eldorado africain pour les investisseurs étrangers.

Mais plus de dix ans de success story économique ont soudainement été remis en cause en avril 2016 après les révélations d’emprunts de 2 milliards de dollars Flag_of_Mozambique.svgcontractés dans le secret par les plus hautes instances du pays. La dissimulation très maladroite de ces emprunts a provoqué un scandale international et conduit le pays dans une crise financière du fait du brutal surendettement entraînant des réactions/sanctions immédiates du marché et des bailleurs. Derrière les entreprises publiques de droit privé ayant contracté ces emprunts, un même responsable : le Gestão de Investimentos, Participações e Serviços (GIPS), une émanation des renseignements mozambicains (SISE), dont la supervision revient au ministère de l’Intérieur. Ce scandale révèle les dessous du succès économique mozambicain : des privatisations opaques profitant à nombre de dignitaires du régime, tolérées par les institutions deEmblem_of_Mozambique.svg Bretton Woods. Ainsi, en 1996, lorsqu’il était gouverneur de la Banque centrale, l’actuel ministre de l’Économie et des Finances, Adriano Maleiane, dubitatif quant à la privatisation des deux banques d’État, s’était vu répondre par les émissaires de la Banque mondiale et du FMI qu’une privatisation corrompue valait mieux que l’étatisation. L’acceptation habituelle des dérives financières de l’establishment mozambicain a fini par le rendre trop confiant et l’a conduit à un montage financier qui remet en cause le modèle de croissance de son économie.

Pour sortir de l’impasse, un plan de restructuration de la dette est à l’étude avec le FMI et le gouvernement compte sur l’assistance de certains pays émergents. Si au niveau économique les vertus de cette stratégie restent à démontrer, au niveau politique le parti au pouvoir est clairement perdant en termes de crédibilité auprès des partenaires internationaux et de la population mozambicaine. Cette crise financière augmente nettement le degré d’incertitude à moyen et long termes et donc le risque politique du Mozambique. En décryptant les intérêts impliqués derrière ce scandale, cette note met en lumière la confusion des intérêts du pays et des intérêts privés de ses caciques.

Le Mozambique, en forme longue la République du Mozambique, en portugais Moçambique et República de Moçambique, est un État situé sur la côte orientale du carte d'afrique avec le mozambiqurecontinent africain. Il est entouré par l’Afrique du Sud, le Swaziland, Madagascar, le Zimbabwe, la Zambie, le Malawi et la Tanzanie. C’est une ancienne colonie portugaise, le premier pays lusophone d’Afrique (devant l’Angola) par sa population et le deuxième par sa superficie. Le pays est membre de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) et du Commonwealth of Nations.