Histoires mauriciennes – Histoires de…»Quand Alexandre Dumas promène son regard sur le Champ de Mars

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Alexandre Dumas aurait-il assisté au plus grand classique du turf mauricien, la Maiden Cup, qu’il appelle la “grande course” la décrivant dans ses moindres details ?
Le grand romancier français, auteur notamment des Trois Mousquetaires et du Comte de Monte Cristo, avait des origines créoles. Fils d’un Haïtien et d’une Française, Dumas n’a cependant jamais mis les pieds dans les îles, encore moins à l’île de France. Pourtant dans son roman Georges qui se passe presqu’entièrement à Maurice durant les premières décennies du 19e siècle, il se livre à une description dantesque de la course et des ses préliminaires…

Au chapitre XVII du roman, intitulé Les courses, l’auteur commence par évoquer les fêtes du Yamsé qui ont lieu un samedi à Port-Louis. Il explique que cette fête réunissant, dans les rues de Port-Louis, “les lascars de mer et les lascars de terre, précédés d’une musique barbare consistant en tambourins, flûtes et guimbardes”, n’est cependant qu’un “prologue” à la grande journée du lendemain, dimanche, dédiée aux courses de chevaux.
Nous sommes en l’an de grâce 1824 et Port-Louis a été frappé, six jours plus tôt, par un cyclone que Dumas appelle par ailleurs “ouragan”. La journée de courses se déroule donc dans un contexte post cyclonique et festif.
Si un grand nombre de spectateurs était déjà massé dès le lever du jour dans toute la partie non réservée du Champ de Mars, les notables, eux, ne commencèrent à arriver qu’à partir de 10h. “Comme à Londres, comme à Paris, comme partout où il y a des courses, des tribunes avaient été réservées pour la société. Mais soit par caprice soit pour ne pas être confondues les unes avec les autres, les plus belles femmes de Port-Louis décidèrent d’assister aux courses dans leurs calèches (…) toutes vinrent se ranger en face du but laissant les autres tribunes à la bourgeoisie ou au négoce secondaire (…)”
Dumas cite même des jeunes filles issues de familles connues, comme “mademoiselle Cypris de Gersigny, alors l’une des plus belles jeunes filles, aujourd’hui encore l’une des plus belles femmes de l’île de France et dont la magnifique chevelure noire est devenue proverbiale, même dans les salons parisiens”. Ou encore les six demoiselles Druhn (déformation du nom de famille Drouhin?), “si blondes, si blanches, si fraîches, si grâcieuses”…
Quant aux jeunes gens, l’auteur explique qu’ils étaient pour la plupart à cheval et s’apprêtaient à suivre les coureurs dans la partie intérieure du tracé de la course, pendant que les amateurs se tenaient sur le turf, occupés à parier “avec le laisser-aller et la prodigalité créoles”.
Dumas indique aussi que d’autres courses “grotesques” avaient lieu en guise de préliminaires: une course au cochon au cours de laquelle le public essayait d’attraper un cochon dont on avait graissé la queue avec du saindoux; une course aux sacs réunissant cinquante coureurs dont le premier prix était un parapluie qui “aux colonies et surtout à l’île de France a toujours été l’objet de l’ambition des nègres”; et une course sur deux tours de piste disputée par une trentaine de poneys, “montés par des jockeys indiens, madécasses ou malais et qui récréent le plus la population noire de l’île”.
La principale attraction demeurait cependant la course principale, réservée aux gentlemen riders. Et c’est là que la fiction prend le pas sur la réalité, dans le roman de Dumas. Dans la grande course, les participants sont au nombre de quatre et l’un des cavaliers n’est autre que Georges Munier, le mulâtre, qui n’avait qu’une seule idée en tête, celle de se venger des insultes qui lui avaient été faites par Henri de Malmédie, propriétaire et cavalier de l’un des quatre coursiers alignés au départ. Les autres coursiers appartenaient à un certain M. Rondeau de Courcy et au colonel Dreaper (ou le fameux Draper?) Et, après deux tours de piste, rythmés par une chute, quelques acrobaties et les applaudissements nourris de vingt-cinq mille spectateurs faisant flotter leurs mouchoirs, c’est bien évidemment Georges, monté sur un pur sang arabe, qui gagna la course… sans empocher le trophée, une coupe en vermeil et avant de disparaître, à la stupéfaction générale, dans les bois entourant le tombeau Malartic !
C’est ainsi qu’Alexandre Dumas conclut sa tournée, après avoir entraîné le lecteur dans une virevoltante description d’une journée de courses au Champ de Mars… sans y avoir jamais assisté. Comme chacun le sait, il a souvent fait intervenir des contributeurs dans l’écriture des ses nombreux romans.

Mais qui est donc celui auquel il fit appel pour écrire Georges et plus particulièrement ce passage très bien documenté sur les courses?
Vous le saurez dans un prochain article à paraître sur Histoire(s) Mauricienne(s) …

SERIE D’ETE DE L’EXPRESS Chaque semaine, une nouvelle ayant comme décor une région de France, c’est L’EXPRESS qui nous le fait vivre avec six auteurs différents. Pour cette semaine, Les Alpilles. IV L’Epouvantail-de Sandrine Colette.- « Théâtre d’un règlement de comptes dramatique dans une famille vignerons. »

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C’était la faute de la vieille, celle qui a enterré son mari en riant, pas celle de Lambert ni celle de Marie qui défendait sa mère bec et ongles. Le seul tort partagé par Lambert et Marie, c’est le jour ou ils ont accepté qu’elle partage leur lieu de vie. Elle y vit depuis presque dix ans, dans la chambre pour l’enfant qui n’a jamais voulu naître, au bout du couloir.
La belle mère qui dans son discours disait à chaque fois, c’est quand on a des enfants que l’on voit le temps passé. Pour Lambert, c’était son travail dans ses cultures de vignes et d’oliviers, sous le soleil écrasant des Alpilles,Olivier avec ses mains calleuses usées par des outils, son dos cassé par les arbustes, les ruches et le potager, tout ce qui leur permet de vivre un peu et qui les ramenait à la réalité des années qui ont détalé. La vie s’est améliorée quand Marie a eu cette idée d’ouvrir une chambre d’hôtes. Au début il râlait contre la présence des touristes qui venaient aux Baux. Cette activité a changé la situation de la famille. Marie aime voir du monde et Lambert est resté toujours ours. Quand il y a des hôtes à la maison, il s’enfuit dans les vignes pour aller mettre en action son canon effaroucheur de piafs qui dévorent ses grenaches, il imagine que les vacanciers vont être réveillés avant sept heures par ses tirs à blanc.

Vigne.jpgLa belle mère, elle aide Marie et raconte ses légendes aux vacanciers qui l’écoutent religieusement sous la tonnelle en prenant l’apéritif, après ils achèteront quelques cartons de vin des Alpilles et rentreront chez eux en se rappelant de la singularité de ce pays, du sourire rond et chantant de Marie et de la belle mère, cette charogne de 80 ans sèche comme un cep cde vigne et vive comme l’eau de la Durance. Quand à Lambert, il fera partie des oubliés.
Lambert, s’interroge beaucoup sur sa belle mère et son couple, pourquoi ne seraient-ils (lui et Marie) libres maintenant à 50 ans passés ? Pourquoi ne pas faire intégrer la vieille dans une maison de retraite ? Cette discussion animait leurs nuits et la question du choix entre la mère et son homme. Il devenait par moment violent et gueuler même après ses durs labeurs dans ses vignes et ses oliviers.
Un soir après avoir bu un vin trafiqué, il s’est endormi à table et s’est retrouvé ficelé comme un cochon, ligoté des pieds, ventre et bras contre la croix de bois de l’épouvantail. On lui avait passé une longue veste et un chapeau élimé. Il avait repris connaissance depuis plus de trois heures et subissait le bruit du canon qui pétait toutes les vingt minutes et les chieries des oiseaux qui revenaient. Ca gratte, ca dérange, les insectes qui se promènent sur sa peau, la chaleur sur son crâne sous le chapeau. Lambert voit le soleil monter dans le ciel. Saleté de veste qui lui tient trop chaud. Les Sandrine Collette 1heures passent, midi ? 14 heures et d’autres heures ? Il a l’impression que la transpiration grésille sur sa peau, se fige faisant des cloques. Ses vêtement s’imbibent et se collent à lui. Il est entrain de fondre dans l’épouvantail. Lambert devient une plante et va crever. Bon Dieu et enfin du bruit, il pense à Marie et son être est tendu vers le sentier, une petite silhouette frêle qui apparaît, c’est la vieille qui arrive. Elle s’assoit sur le pliant qu’elle a mené dans la brouette et pose le tromblon de son mari à coté d’elle. Lambert lui demande, Qu’est ce que vous foutez là, ou est Marie, est ce que vous lui avez dit ? Elle ne répond pas et l’ignore complètement, elle charge le fusil de chasse et Lambert insiste en lui disant : Et si je vous promets que vous resterez là ? Vous le savez, je n’ai qu’une parole. Elle ne répond pas et continue de noter dans son carnet à chaque tir du canon effaroucheur. Il comprit que c’est trop tard et sa voix chevrote, s’il vous plait. En attendant, la vieille a pris une pelle dans la brouette et creuse à coté de lui, un trou déjà mou, un trou préparé depuis des jours, qu’il n’y a plus qu’à ouvrir. Est-ce que Marie est au courant ? demande Lambert, Oui dit-il, non elle répondit. Elle s’assied sur le pliant en disant quatre minutes, il crie, il gueule, suppliant avec la chaleur jusque dans les doigts et la trouille au ventre, il implore. Une minute trente, souffle la vieille. Au premier coup de canon la vieille épaule son arme et puis le troisième coup, exactement en même temps comme un écho imperceptible………

L’auteur
Sandrine Collette est titulaire d’un master en philosophie et un doctorat en Sandrine Collettescience politique. Elle devient chargée de cours à l’université de Nanterre, travaille à mi-temps comme consultante dans un bureau de conseil en ressources humaines et restaure des maisons en Champagne puis dans le Morvan.
Elle décide de composer une fiction et sur les conseils d’une amie, elle adresse son manuscrit aux éditions Denoël, décidées à relancer, après de longues années de silence, la collection « Sueurs froides », qui publia Boileau-Narcejac et Sébastien Japrisot. Il s’agit Des nœuds d’acier, publié en 2013 et qui obtiendra le grand prix de littérature policière ainsi que le Prix littéraire des lycéens et apprentis de Bourgogne. Le roman raconte l’histoire d’un prisonnier libéré qui se retrouve piégé et enfermé par deux frères pour devenir leur esclave. En 2014, Sandrine Collette publie son second roman : Un vent de cendres (chez Denoël). Le roman commence par un tragique accident de voiture et se poursuit, des années plus tard, pendant les vendanges en Champagne. Le roman revisite le conte La Belle et la Bête.
Pour la revue Lire, « les réussites successives Des nœuds d’acier et d’Un vent de cendres n’étaient donc pas un coup du hasard : Sandrine Collette est bel et bien devenue l’un des grands noms du thriller français. Une fois encore, elle montre son savoir-faire imparable dans Six fourmis blanches. Son dernier ouvrage paru est Les larmes noires sur la terre (chez Denoël)

SERIE D’ETE DE L’EXPRESS Chaque semaine, une nouvelle ayant comme décor une région de France, c’est L’EXPRESS qui nous le fait vivre avec six auteurs différents. Pour cette deuxième semaine, c’est l’Alsace qui nous sert de décor. II – Le barbier de Sesheim de Dominique Sylvain. – Un quiproquo mortifère.

Alsace.jpgL’histoire d’un tueur, un foutu tueur qui s’enivre avec le gewurztraminer et des anxiotiques après avoir égorgé la victime.
Rosine, une débrouillarde aux boucles caramel aux joues abricot, la trentaine, robuste, qui ne lit jamais des livres. Elle n’aime que son vélo et des tartes aux myrtilles des auberges. Elle couche avec Bernard, deux nuits par semaine, depuis le divorce de ce dernier. Elle a un beau sourire et des mains agiles en or d’une couturière.
Bernard aime les livres et travaille comme Rosine, à l’éco Musée de Sesheim, pour mettre en valeur leur région et ce beau village typique. De plus, il est l’unique barbier du village, métier qu’il a appris avec son grand père, mortGewurztraminer à quatre vingt douze ans. Ce métier, il l’a appris tard, après avoir fait une école de commerce, il était devenu commercial, il a pointé après à l’ANPE, pendant un temps. Il est entré par la suite dans la paix du passé en qualité de barbier et par son action pour valoriser son village.
Mathieu, un visiteur d’un jour à l’éco musée qui fini par sympathiser avec Bernard animé par cette envie de devenir barbier après des années de galère. Il considère que les gens sont stressés et qu’il est difficile de se raser raser le crânele crâne soi-même. Bernard accepta de l’initier au métier en utilisant la tête d’un mannequin de l’éco musée. Il s’entraina sérieusement et obtint son permis de barbier certifié par Bernard.

Pour fêter cette réussite, ils vont à la buvette de l’écomusée et assiste au spectacle, sur le podium Rosine fait le mannequin. A la fin du spectacle, Bernard travaille pour que Rosine ne s’intéresse pas à Mathieu. Une violente crise de jalousie finit par habiter Bernard en jouant le film de son passé, quand sa femme avait couché avec un de ses collègues.

Il envisagea ainsi de mettre fin à la vie de Mathieu en préparant un cocktail composé de son gewurztraminer, d’un sorbet à la vodka, des somnifères et de l’acide pour le faire disparaître à jamais dans un puits profond ou Mathieu se dissoudra en toute tranquillité.
Bernard organisa un diner, au quel Mathieu ne s’est pas rendu, il avait préparé son gewurztraminer en y diluant des cachets. Au cours de cette Rasoirréception, sa mémoire a zappé, interrogeant Rosine sur sa présence sur une site de rencontre ou elle s’éclatait et cette dernière l’a traité de pauvre mec. Pour cela, elle l’a égorgé avec son rasoir de collection. Puis il partit, laissant sa maison isolée, lieu du crime, pour se rendre à l’éco musée et il prit le temps avant d’approcher le rasoir de collection à son poignet gauche……………..
Dominique Sylvain a été journaliste indépendante pour Le Journal du Dominique Sylvaindimanche, puis journaliste d’entreprise et responsable du mécénat dans la sidérurgie (groupe Usinor).Elle a reçu le Prix Sang d’encre en 2000 pour Vox, le prix Michel-Lebrun en 2001 pour Strad, le Grand prix des lectrices de Elle 2005 pour Passage du Désir et le Prix du meilleur polar français 2011 décerné par la rédaction du magazine LIRE pour Guerre sale. Ses romans ont tous été publiés aux Éditions Viviane Hamy, dans la collection Chemins nocturnes.

SERIE D’ETE DE L’EXPRESS Chaque semaine, une nouvelle ayant comme décor une région de France, c’est L’EXPRESS qui nous le fait vivre avec six auteurs différents. Nous commençons par la Normandie I – UNE FILLE TOUTE SIMPLE de Nadine Monfils

Normandie

« J’ai suspendu mes rêves sur le fil de mes souvenirs, avec une pince à linge. Il ne faudra même pas les repasser, ils sont in défroissables. » C’est la phrase notée par Jeanne sur son calepin au moment ou le train s’arrête à la gare de Trouville-Deauville, moment ou elle observe l’employé de la SNCF et son Képi.
Marcel au Képi, un homme ordinaire, banal et transparent comme elle qui s’habille avec des gestes méthodiques comme un robot , programmé pour survivre, comme elle technicienne de surface…plus chic que femme de ménage. Cet homme elle l’a dénommé Marcel et c’est lui qui a enclenché chez elle cette envie d’écrire. Elle a fait le lien avec la comédie Musicale,Ter Normandie.jpg lorsque John C Reilly chantait Mister Cellophane L’histoire d’un homme que personne ne remarquait , mais quand il chantait, il illuminait tout le monde de son aura. Jeanne n’avait aucun don, son cœur était sec, come ce pays de nulle part, ou Brel inventait des perles de pluie, sauf quand elle écoutait Mister Cellophane et l’homme du quai c’était lui.
Marcel rentrait chez lui chaque soir et se transformait en Yolanda, il se rasait, mettait une bonne couche de fond de teint, un rouge à lèvres rouge Dalida Gigi l_Amorosopétant, enfilait sa robe à paillettes, sa perruque aux longs cheveux roux et roule ma poule pour aller chanter au P’tit Bichou à Dives sur Mer, ou il faisait un tabac en chantant les airs de Dalida Gigi l’Amoroso. Au début, il faisait ca pour aider Ana, son amie d’enfance qui a eu à subir des périodes difficiles avec un mari un poivrot mort sous un camion , lui laissant un fils trisomique. Elle est soutenue par son père qui vivait dans une petite maison d’ouvrier de la cité Blanche face à l’hippodrome de Cabourg. Ana c’était l’amour qu’il a voulu avant le passage du poivrot. Peu à peu Marcel s’est attaché à son enfant perdu.
Personne ne savait que chaque soir Marcel devenait Yolanda, Dalida s’était suicidée , mais elle lui a sauvé la vie. La chanteuse s’était incrustée en lui et il chantait et murmurait partout « Laissez moi danser……chanter en liberté…..Laissez moi aller jusqu’au bout du rêve….. ». Jeanne la fille du train avait remarqué cela.
Un samedi Ana avait mis une robe bleue et attendait Marcel avec une bouteille de calva et un gâteau aux pommes du jardin pour célébrer les quarante ans de connaissance. Dédé le gamin était chez son grand père. Ana a tout organisé pour séduire le Marcel. Il proposa le mariage à Ana et celle-ci accepta. Le petit Marcel est ai si coincé, la quéquette en panaché et le cerveau sur le quai des brumes, T’as de beaux yeux, tu sais…..Et Dalida dans tout ça, qu’allait-elle devenir ? dans ses cauchemars Dalida lui tapait dessus avec une guitare, car Ana aimait Elvis Presley et pas Dalida. Il seElvis Presley rappela ce que lui disait son grand-père quand il avait un verre dans le nez. Bite n’a pas d’œil ; C’est sur que l’amour est aveugle. Marcel pensait à ses vieux jours, seul dans sa petite maison d’Houlgate, avoir quelqu’un pour ramasser les coquillages ensemble lui poussant à prendre sa pelle et son seau. Il finit par voir que son acte allait être positif pour tous, lui-même, Ana, le gamin et le grand-père. Ce vieux monsieur qui jouait de l’accordéon quand il avait un coup dans le nez, Il chantait cet air qui raconte sa maladie :
La valse des Tréfi de Mil Marie Mougenot
« Il fallait se lever tôt
Pour bosser chez Trefimétaux
Je suis rentré l’âme confiante
J’en suis r’sorti farci d’amiante
Un ministre l’a déclaré vous serez tous indemnisé
En attendant, je tire la patte
J’reste chez moi manger patates »
Marcel l’aimait ce vieux pépé.
Pour le mariage, Ana avait bien préparé son trousseau. Pour la faire plaisir, Marcel avait déniché Elvis Cadillac, sosie d’Elvis Presley, un belge pété du couvercle qui donnait des concerts. Le grand jour arriva , IN THE MOOD FOR LOVE à Dives sur Mer avec photos sur la plage de Cabourg face à la mer ou dos au casino, agapes au restaurant le petit Bougnat. Elvis Cadillac au volant de sa Cadillac rose et de sa chemise de la même couleur était bien couple mariéprésent. Il commença la soirée par LOVE ME TENDER puis YOU’LL NEVER WALK ALONE, c’est à ce moment que la mariée disparut. Marcel pensa qu’elle était partie se faire encore plus belle. Comme elle ne répondait pas sur son portable. Il se rendit chez le pépé et constata qu’elle était morte avec le gamin et le pépé. La police conclut que le vieux bouffé par l’amiante avait pété les plombs et ne pouvait pas accepter le mariage de sa fille.
Marcel reprit sa vie à la gare de Trouville et continua avec sa robe de paillètes le soir. La fille du train l’a suivi un jour et décida de simplifier sa vie en la gardant pour elle toute seule. Tous les jours elle regardait l’homme du quai et il ne la voyait pas. Il était à elle et Elle souriait.
I’LL NEVER LET YOU GO.
L’AUTEUR
nadine-monfils-testud.jpg est belge et vit à Montmartre. Elle est l’auteur d’une quarantaine de romans et de pièces de théâtre, dont des polars à la « Série Noire » et des thrillers chez Belfond. « la petite fille fêlée aux allumettes », « le silence des canaux », avec des personnages qui déjantent et l’humour qui scotche. Le dernier ouvrage « Ice cream et châtiments » (Fleuve noir), histoire tragi comique avec cadavre et majorette, de la tournée du Sosie du King, Elvis Cadillac.

Le collier rouge – Jean-Christophe Rufin – paru le 27 février 2014 aux éditions Gallimard – Prix Maurice-Genevoix 2014.

Atteinte de Rufinite aigue, «vous connaissez aussi bien que moi cet auteur, médecin de carrière, qui a consacré une partie de sa vie à  des actions humanitaires, cet engagement Jean-Christophe Rufindifficilement égalable est retranscrit à  travers son écriture, ambassadeur de France au Sénégal et en Gambie et académicien. Sa philosophie quotidienne se résume dans une phrase : « J’ai été déformé  dans le sens visuel Comme le disait Kundera, il ya deux sortes d’écrivains, l’écrivain musicien et l’écrivain peintre. Moi je suis peintre. Quand on écrit, soit on écoute, soit on voit. On ne peut pas faire les deux en même temps ». J’achète et lis systématiquement ses livres, sûr de passer un bon moment. Ainsi je n’ai pas vu passer ces quelques jours à Andernos Les bains avec Milena Agus et Jean-Christophe Rufin.

Le collier rouge est un petit bijou qui nous emmène au lendemain de la première guerre Le collier rougemondiale. En cent quarante pages, Le collier rouge prouve que la littérature n’est pas affaire de taille et de poids.

En 1919, en plein été, dans une bourgade du Berry, Jacques Morlac, un héros de la guerre, un ancien de la campagne d’Orient, médaillé de la Légion d’Honneur, fils de paysan, croupit en prison. Il a gravement porté atteinte à  la Nation pendant le défilé du 14 juillet et risque d’être envoyé au bagne.

Un gradé, aristocrate, juge, Hugues Lantiez du Grez, est chargé de voir clair dans cette affaire qui a provoqué un énorme scandale et de décider de la sentence. A l’extérieur, le chien du détenu, hurle à mort des jours durant. Le juge s’émeut du courage de cet animal, qui a la force de hurler son attachement, jour et nuit dans une chaleur épuisante……Ses aboiements sont des messages à décrypter au même titre qu’il faut accéder à la personnalité complexe du prisonnier.

Hormis le chien dans les personnages, il y a aussi Valentine, la femme aimée par Jacques Morlac. Cette femme est une militante pacifiste. A l’époque, ils étaient nombreux mais Le travail des femmes.jpgpersécutés. « Grâce à elle, Morlac va comprendre quelque chose et la guerre va lui permettre de voir toutes ses idées concrètement ». Et puis, Morlac l’insoumis est un écorché, fidèle au même titre que son chien. Il est revenu au pays pour Valentine, sa compagne, celle dont il a un fils, et pourtant au dernier moment dans un revirement que l’on ne comprend pas, il s’enfuit, refuse de la revoir. Cette femme recluse au fond de sa campagne est dure, courageuse à la tâche et instruite.. Elle est celle qui a façonné l’esprit de Morlac, cet homme qu’elle aime, lui faisant lire Proudhon Propotkine, Marx, lui insufflant  le goût de la révolte et de l’admiration de la Révolution russe……

Le livre retrace les entretiens entre le juge Lantier du Grez et Morlac. Peu à peu, les apparences s’effacent pour laisser apparaître les fêlures, les contradictions, les révoltes, l’histoire personnelle des deux protagonistes, tout cet étagement psychologique qui fait l’originalité et la particularité de chacun…….. Lantier du Grez, officier distant et de bonne éducation, modéré et sage, délicat et sensible portant lui aussi ses traumatismes essaie de comprendre Morlac l’insurgé douloureux, se murant dans ses silences. Mais ces deux hommes d’origine si différente ont en commun l’épreuve de la guerre……L’auteur écrit :

« Ils avaient cela en commun, tous les deux, cette fatigue qui ôte toute force et toute envie de dire et de penser des choses qui ne soient pas vraies. Et en même temps, parmi ces pensées, celles qui portaient sur l’avenir, le bonheur, l’espoir étaient impossibles à  formuler car aussitôt détruites par la réalité sordide de la guerre. Il ne restait que des phrases tristes, exprimées avec l’extrême dépouillement du désespoir ».

Le juge, un homme de paix, remonte le fil, de la pensée et des choix de Morlac. Il perce à  jour les désespoirs, les rébellions, les dissidences.

Je vous livre cet extrait :

Le juge « se leva et ouvrit la fenêtre. Le chien toujours au même endroit, s’était dressé sur ses pattes de derrière.

– Vous êtes très injuste avec ce pauvre animal, dit le juge pensivement. Vous lui en voulez pour sa fidélité. Vous dites que c’est une qualité de bête. Mais nous en sommes tous pourvus, et vous le premier……. Vous portez cette qualité si haut, que vous n’avez jamais pardonné à Valentine d’en manquer. Vous êtes l’homme le plus fidèle que je connaisse. C’est pour elle que vous êtes revenu ici, n’est-ce pas ?

Morlac haussa les épaules.

– Je crois, poursuivit le juge, que la vraie différence avec les bêtes, ce n’est pas la fidélité. Le trait le plus proprement humain et qui leur fait complément défaut, c’st un autre sentiment, que vous avez de reste.

– Lequel ?

– L’orgueil !

Il avait touché juste et l’ancien combattant, perdait son assurance.

– Vous avez préféré la punir et vous punir en mettant en scène ce simulacre de rébellion, plutôt que de lui parler pour connaître la vérité. C’était un évènement sur mesure pour elle

– Tant mieux si elle a relu le message.

– Malheureusement vous n’avez pas entendu sa réponse »

Selon l’académicien, « la guerre de 14 a bouleversé toutes les conditions, celles des femmes, des ignorants qui deviennent très conscients des problèmes du temps, celles des classes ». Pour l’auteur, ce n’est pas un roman antimilitariste, mais « une invitation à  dépasser » le stade « de l’hostilité, de l’affrontement et à aller vers quelque chose de l’ordre de la construction et de la fraternité. C’est un roman humaniste. »

La guerre 14-18 n’a pas connu que des heures glorieuses ; en 1917, la révolution russe a suscité des remous jusque chez les Français. L’auteur dévoile par petites touches les dessous de l’affaire. La société du début du XXème siècle et de l’après-guerre éclate et ce ne sera plus jamais comme auparavant. « Ce n’est pas un livre sur la guerre. C’est l’après-guerre, le temps dans lequel nous vivons et ce qui s’est créé dans cette période. Ce qui est restitué dans ce huis clos, c’est ce monde de l’après-guerre, ce monde de l’Europe, qui passe de la barbarie animale ou  l’on se déchire, à la fraternité ».

Ce livre, « c’est aussi un petit hommage à ces chiens qui ont suivi leurs maîtres, il y en avait des centaines de milliers dans les tranchées. Certains ont eu un rôle héroïque, explique l’auteur.  Ils posent le problème de la part animal, le combattant est un animal, et c’est ce qu’on lui demande, d’être une bête, d’être d’une cruauté terrible à l’égard de ses ennemis. Mais ce qui va différencier l’animal de l’être humain, c’est la fidélité selon l’écrivain. « Le chien défend ses amis. Le fait d’être humain, c’est le fait d’aller au-delà  de ça, c’est à dire pas seulement défendre ses amis, mais d’être aussi capable de voir l’être humain dans l’ennemi », précise-t-il. C’est toute l’histoire de ces guerres, la seule victoire, c’est aujourd’hui, un siècle après, quand on a pu dépasser ça et faire alliance avec ses ennemis. On a dépassé notre part animale », analyse Jean-Christophe Rufin.

Chaque personnage, chaque acte prend une résonnance, un éclairage, qui nous conduit dans une réflexion personnelle sur la révolte, la fidélité, l’héroïsme. Qui est le héros du livre ? Qu’est-ce qui le définit?

C’est la lecture de l’évènement, faite avec le recul qui nomme le  héros. On ne nait pas héros, on le devient par le regard des autres qui confèrent la distinction, en fonction des actions réalisées. Le héros est courageux, et porte en lui une part d’inconscience face au danger. Il est fort, et ne s’enorgueillit pas de sa prouesse. Il ignore la difficulté, et le danger. Il est fidèle, il ne remet pas en question sa ligne de conduite. Sa loyauté est sans faille.

A l’annonce de tous ces critères, ne pourrait-on pas penser que le vrai héros de l’histoire est Guillaume ? Qui est Guillaume ?

Je vous invite à découvrir ce livre, émouvant sensible et porteur de réflexion et vous saurez ainsi qui est Guillaume. Vous le lirez dans sa trame, ensuite il résonnera en vous, portera votre méditation encore une fois sur les désordres, les cassures et les déchirures de la guerre.

Je vous livre aussi un autre extrait qui pour moi est actuel en guise de conclusion

« Si vous me condamnez le peuple se révoltera. » dit Morlac

Réponse de Lantier « Croyez-Vous ? Vous avez fait rire les gens, c’est entendu. Mais parmi ceux qui vous ont applaudi, combien s’armeront pour vous défendre ? Si vous n’avez rien fait, ce serait les mêmes qui auraient acclamé le défilé. Le peuple, dont vous faites si grand cas est fatigué de se battre, même contre la guerre. Bientôt vous le verrez passez avec indifférence devant les monuments aux morts.»

Sachez que cette histoire est basée sur quelque chose de réel qui a été raconté à  l’auteur par un ami photographe, Benoit Gysembergh, qui a succombé à  une maladie peu de temps avant sa publication. C’est l’histoire, de son grand-père, héros de la guerre, qui a été écrite pour le centenaire du premier conflit mondial. Je vous laisse lire pour en savoir plus.

Mal de Pierres de Miléna Agus

J’avais déjà  écrit sur un roman de Milena Agus « Sens dessus dessous », juste avant la sortie en salle de « Mal de Pierres », adapté par Nicole Garcia dont l’actrice principale est Marion Cotillard. Ce livre m’a bien occupé ces deux derniers jours.

Mal de pierres

« Mal de Pierres », c’est l’histoire d’une grand-mère racontée par sa petite-fille. A l’automne 1950, cette grand-mère avait presque 40 ans. Elle quitta alors pour la première fois son village sarde de Cagliari pour aller en cure thermale sur le continent. Elle souffrait du mal de pierres (les calculs rénaux), elle ne parvenait pas à mener à  terme une grossesse. A cet endroit , elle a rencontré « le Rescapé», un homme qui lui offrit écoute et attention. 9 mois après la cure est né un petit garçon, le père de la narratrice.

On tombe vite sous le charme de cette histoire un brin désuète et intrigante, la grand-mère s’est mariée sur le tard, en 1943, alors qu’elle avait plus de 30 ans, elle est déjà  considérée comme une vieille fille par les siens, dans une Sardaigne qui connaissait les affres de la Seconde Guerre mondiale… Et lorsqu’elle conclut cette union très attendue, c’est en affirmant haut et fort que ce n’est pas par amour mais par raison. Elle entretenait avec son époux une relation curieuse, généreuse pourvoyeuse de prestations de maisons closes, tout le monde l’a toujours considérée comme un peu folle, alors ce mariage venait à point nommé.

L’amour s’est fait attendre, jusqu’à la rencontre, avec le « Rescapé», sur le continent, lors de cette cure thermale, destinée à  guérir son « mal de pierres », mais qui a eu raison aussi de son « mal d’amour ». A sa petite-fille, elle raconta quelques décennies plus tard ses émotions, ses cheminements, tout en laissant des zones d’ombres. On avance ainsi sereinement dans l’histoire, jusqu’à  la dernière page qui offre un nouveau point de vue et nous fait reconsidérer totalement le récit

L’autre héroïne de ce livre est la Sardaigne, un pays sec, rugueux qui rend les femmes un2 peu cinglées et les hommes en décalage avec le reste du monde. Milena Agus est de cette île. Son roman débute comme une biographie familiale, Le bilan est déjà  assez brillant, mais la romancière ne s’arrête pas, aimant les mensonges elle nous offre un retournement de dernière minute. En fait, les Sardes doivent être comme ça, séduisants et imprévisibles, libres de tout réinventer et avec un sacré talent.

Milena Agus en partant d’une biographie familiale qui se poursuit en aventure fusionnelle, fait un tour par l’Histoire, porte un regard sur la société italienne et ses injustices de classe, n’oublie jamais de glisser une pointe d’humour. Elle passe ainsi à  la moulinette l’amour, le sexe, la tendresse, le rêve et n’oublie pas bien sur la littérature, cet art du mensonge, ou de la vérité. Allez savoir.

Les romans d’amour ne sont jamais aussi prenants que lorsqu’ils nous parlent du malheur d’aimer, ou, variante, de comment une vie aimante ne peut être admise qu’au prix de sa dénégation la plus obstinée. Parce que l’amour, justement, est si important (sûrement la chose la plus belle du monde) qu’il ne pourra jamais être celui que l’on vit soi-même. Ce sont les délices et les tourments d’un tel amour que nous donne à gouter Mal de pierres, un petit bijou de roman, poli comme une pierre précieuse et délicieux, pour ne pas dire entêtant, comme certains gâteaux sardes, tout miel et tout anis.

Ce livre est un bijou. On voudrait en rester là, de crainte de trahir sa construction insolite, de déflorer sa sensibilité. Une vision de la société sarde abordée de manière subtile par le biais de personnages attachants et torturés. La nouvelle est courte et judicieusement construite. On se laisse bercer tendrement par les images et la chronologie du texte. Certes le fond est plutôt convenu mais les ornements sont tellement riches qu’on y adhère bien volontiers. Le roman mérite une deuxième lecture ne serait-ce que pour appréhender le texte une fois la fin connue et …renversante.

3Milena Agus est née en 1959 en Italie. Mal de pierres est son premier roman et, avait enthousiasmé le public français avec près de  400 000 exemplaires vendus. Le succès s’est propagé en Italie Il a valu ensuite à Milena Agus une notoriété internationale, car ce roman a été traduit dans 26 pays. La Sardaigne, son île, haute en couleur et en saveurs, a toujours le beau rôle. De ses romans, elle dit «  C’est ainsi que je vois la vie, misérable et merveilleuse». De sa famille, elle dit qu’ils sont « sardes depuis le paléolithique ».

J »ai passé, encore une fois  un bon moment en me promenant en Sardaigne tout en partageant la vie des personnages touchants d’Agus.