Institut Montaigne  – Comment va l’Italie ? Trois questions à Andrea Montanino –  jeudi 14 septembre 2017 publié dans  Europe / Monde

 

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Membre fondateur de l’Union européenne, l’Italie, rencontre depuis quelques années des bouleversements aussi bien économiques et que politiques qui interrogent sur son rôle actuel dans la construction européenne. Andrea Montanino, économiste italien et membre de l’Atlantic Council, revient, pour l’Institut Montaigne, sur l’état de son pays.

La question économique figure parmi les principales préoccupations des Italiens. Quels sont les différents clivages politiques de ce point de vue ? 

Le premier élément à retenir est que, depuis l’entrée en vigueur de l’euro, les principaux partis italiens ont défendu des positions relativement convergentes sur la politique économique. Les gouvernements successifs ont tous poursuivi la double ambition de préserver la bonne santé des finances publiques tout en maintenant la dette souveraine en dessous des 3 %, tel que fixé par le Traité de Maastricht. Ils ont également tenté de donner plus de flexibilité au marché du travail et de réformer l’administration pour en améliorer l’efficacité. Enfin, les gouvernements ont mis en place des réformes des retraites dont l’objectif était de maintenir la stabilité à long terme des finances publiques.
S’agissant maintenant des autres forces politiques, les plus petites comme les extrêmes, plus aucune ne remet l’euro en question. Si le Mouvement 5 étoiles et la Ligue du Nord ont pu se montrer critiques à l’égard de l’Union européenne, ça n’est, selon moi, plus un sujet aujourd’hui. La prochaine campagne électorale se concentrera ainsi sur des problèmes sociaux, tels que le choix des politiques à mettre en œuvre en faveur des populations les plus vulnérables. De ce point de vue, les partis de gauche ont des positions très tranchées.
La fiscalité sera aussi une question clé. Si le Parti démocrate et Forza Italias’accordent sur les réductions d’impôts, le Parti démocrate se montre plus déterminé à maintenir le déficit public à un taux bas et souhaite, en conséquence, réduire les dépenses publiques. Le centre-droit n’a, quant à lui, pas présenté de politique de dépenses particulière, un comportement loin d’être surprenant de la part d’un parti conservateur. L’agenda économique du Mouvement 5 étoiles se concentre majoritairement sur deux éléments : le « coût de la politique », ce qui revient à cibler les salaires des parlementaires, et l’instauration d’un revenu minimum pour chaque Italien. A ce jour, la mise en œuvre de ces mesures n’a pas été détaillée. La création d’un revenu minimum universel pourrait constituer une question sensible, notamment si elle s’appliquait aux migrants résidant sur le territoire italien.
Pour conclure, je ne vois pas, dans les cinq derniers gouvernements (y compris celui de Berlusconi), de différences notables sur le discours et sur le fond. C’est davantage dans leur capacité à mettre en place leurs politiques qu’ils se différencient. Le centre-gauche et le centre-droit ont, certes, plus d’expérience au gouvernement et donc plus de pratique, mais tout repose finalement sur la personnalité des leaders. On observe ainsi une forme de continuité dans les politiques économiques italiennes et il ne faut donc pas s’attendre à de grandes différences dans les programmes électoraux, à l’exception du Mouvement 5 étoiles, la Ligue du Nord et les parties à gauche du Parti démocrate.

Comment expliquer l’amélioration de la situation économique en Italie ?

Cette amélioration s’explique par plusieurs raisons, endogènes autant qu’exogènes. S’agissant tout d’abord des raisons exogènes, la politique monétaire actuelle de la Banque centrale européenne permet aux secteurs privé et souverain d’emprunter à des taux bas. La situation globale de l’économie européenne, qui progresse, contribue également à améliorer l’économie italienne.
S’agissant maintenant des facteurs endogènes, si l’on a observé, pendant une longue période, un niveau d’investissement privé très bas, la dynamique est en train de changer. Le secteur privé recommence à investir, contribuant ainsi à la reprise économique du pays. Et si ce sont les investissements, davantage que les lois, qui sont à l’origine de la création d’emplois, la réforme du marché du travail permet d’assurer des fondations solides et crée un contexte favorable à la croissance.
Les exportations italiennes sont par ailleurs très performantes, tout particulièrement dans un contexte marqué par un euro faible. Si la récente appréciation de l’euro peut pénaliser les exportations, les entreprises italiennes demeurent compétitives. Ainsi, l’augmentation des investissements privés et le contexte d’un euro faible permettent d’expliquer l’amélioration de l’économie italienne.
Enfin, la consommation des ménages reprend. Les banques ont en effet concédé davantage de crédits, du fait d’une confiance et d’une stabilité retrouvées dans le secteur bancaire. En conséquence, la consommation des ménages a augmenté.

Pensez-vous que l’Italie pourrait être le point de départ d’une nouvelle crise de la dette souveraine européenne ?

Étant donnée la situation actuelle de l’économie européenne, ma réponse est non. La dette souveraine italienne est gérable, comme elle l’a été par le passé. Le refinancement n’est pas non plus pas un problème, même dans un contexte de taux d’intérêt plus élevés, une fois la politique monétaire normalisée. Tant que nous ne sommes pas témoins d’une nouvelle crise mondiale ou européenne, qui pourrait entraîner une perte de confiance en l’Europe, je ne vois aucun risque à ce que l’Italie soit le point de départ d’une nouvelle crise de la dette souveraine.
Le véritable défi en Italie est celui de la croissance économique, fortement pénalisée par le fardeau que représente la dette. Pour financer sa dette, l’Italie dépense environ 17 milliards d’euros d’intérêts par an ; des fonds qui auraient pu être réinjectés dans l’économie ou utilisés pour réduire les impôts. C’est donc bien la dette souveraine qui handicape aujourd’hui l’économie italienne.

From World Economic Forum – Written by John McKenna, Formative Content – The countries where people pay the most tax and the least tax.

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There is a common theme among the 10 OECD countries in which workers pay the most tax: every single one of them is in Europe.

Sitting comfortably ahead of the rest of the pack is Belgium, where workers pay more than half the money they earn in tax in the form of income tax and social security contributions.

This puts Belgium nearly five percentage points ahead of the next highest taxing nation, Germany, in the recently published list of tax rates in OECD countries.

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According to data in the Taxing Wages 2017 report, the average across all 35 OECD member countries is for an individual to contribute just over a third of their pay packet to income tax and social security.

However, workers in the top 10 nations in this list all pay significantly higher than this.

After Belgians paying 54%, second and third place in the list belong to Germany and Hungary, where workers pay 49.4% and 48.2% respectively.

The OECD Taxing Wages 2017 report measures the level of personal income tax and social security contributions in each OECD country by calculating the « tax wedge » – personal income tax, employer and employee social security contributions, minus family benefits received as a proportion of total employer labour costs.

Belgium, Germany and Austria come top on the data when considering the average wages of single, childless workers receiving no family benefits.

However, this tool created by the report’s authors shows that when it comes to families with children, France tops the list with an average tax rate of 40%.

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While European nations have the highest tax rates for both individuals and families, there are a few low-tax European countries too.

Countries with tax wedges for single childless workers that fall below the OECD average of 36% include: Poland at 35.8%; the UK at 30.8%; Ireland at 27.1%; and Switzerland at 21.8%.

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These lower-tax countries belong to a group of 14 OECD member states where the tax wedge is below average.

Among these is the US at 31.7%, Australia at 28.6% and Israel at 22.1%.

The lowest taxed OECD nations are Mexico at 20.1%, New Zealand at 17.9% and Chile at 7%.

 

Mal de Pierres de Miléna Agus

J’avais déjà  écrit sur un roman de Milena Agus « Sens dessus dessous », juste avant la sortie en salle de « Mal de Pierres », adapté par Nicole Garcia dont l’actrice principale est Marion Cotillard. Ce livre m’a bien occupé ces deux derniers jours.

Mal de pierres

« Mal de Pierres », c’est l’histoire d’une grand-mère racontée par sa petite-fille. A l’automne 1950, cette grand-mère avait presque 40 ans. Elle quitta alors pour la première fois son village sarde de Cagliari pour aller en cure thermale sur le continent. Elle souffrait du mal de pierres (les calculs rénaux), elle ne parvenait pas à mener à  terme une grossesse. A cet endroit , elle a rencontré « le Rescapé», un homme qui lui offrit écoute et attention. 9 mois après la cure est né un petit garçon, le père de la narratrice.

On tombe vite sous le charme de cette histoire un brin désuète et intrigante, la grand-mère s’est mariée sur le tard, en 1943, alors qu’elle avait plus de 30 ans, elle est déjà  considérée comme une vieille fille par les siens, dans une Sardaigne qui connaissait les affres de la Seconde Guerre mondiale… Et lorsqu’elle conclut cette union très attendue, c’est en affirmant haut et fort que ce n’est pas par amour mais par raison. Elle entretenait avec son époux une relation curieuse, généreuse pourvoyeuse de prestations de maisons closes, tout le monde l’a toujours considérée comme un peu folle, alors ce mariage venait à point nommé.

L’amour s’est fait attendre, jusqu’à la rencontre, avec le « Rescapé», sur le continent, lors de cette cure thermale, destinée à  guérir son « mal de pierres », mais qui a eu raison aussi de son « mal d’amour ». A sa petite-fille, elle raconta quelques décennies plus tard ses émotions, ses cheminements, tout en laissant des zones d’ombres. On avance ainsi sereinement dans l’histoire, jusqu’à  la dernière page qui offre un nouveau point de vue et nous fait reconsidérer totalement le récit

L’autre héroïne de ce livre est la Sardaigne, un pays sec, rugueux qui rend les femmes un2 peu cinglées et les hommes en décalage avec le reste du monde. Milena Agus est de cette île. Son roman débute comme une biographie familiale, Le bilan est déjà  assez brillant, mais la romancière ne s’arrête pas, aimant les mensonges elle nous offre un retournement de dernière minute. En fait, les Sardes doivent être comme ça, séduisants et imprévisibles, libres de tout réinventer et avec un sacré talent.

Milena Agus en partant d’une biographie familiale qui se poursuit en aventure fusionnelle, fait un tour par l’Histoire, porte un regard sur la société italienne et ses injustices de classe, n’oublie jamais de glisser une pointe d’humour. Elle passe ainsi à  la moulinette l’amour, le sexe, la tendresse, le rêve et n’oublie pas bien sur la littérature, cet art du mensonge, ou de la vérité. Allez savoir.

Les romans d’amour ne sont jamais aussi prenants que lorsqu’ils nous parlent du malheur d’aimer, ou, variante, de comment une vie aimante ne peut être admise qu’au prix de sa dénégation la plus obstinée. Parce que l’amour, justement, est si important (sûrement la chose la plus belle du monde) qu’il ne pourra jamais être celui que l’on vit soi-même. Ce sont les délices et les tourments d’un tel amour que nous donne à gouter Mal de pierres, un petit bijou de roman, poli comme une pierre précieuse et délicieux, pour ne pas dire entêtant, comme certains gâteaux sardes, tout miel et tout anis.

Ce livre est un bijou. On voudrait en rester là, de crainte de trahir sa construction insolite, de déflorer sa sensibilité. Une vision de la société sarde abordée de manière subtile par le biais de personnages attachants et torturés. La nouvelle est courte et judicieusement construite. On se laisse bercer tendrement par les images et la chronologie du texte. Certes le fond est plutôt convenu mais les ornements sont tellement riches qu’on y adhère bien volontiers. Le roman mérite une deuxième lecture ne serait-ce que pour appréhender le texte une fois la fin connue et …renversante.

3Milena Agus est née en 1959 en Italie. Mal de pierres est son premier roman et, avait enthousiasmé le public français avec près de  400 000 exemplaires vendus. Le succès s’est propagé en Italie Il a valu ensuite à Milena Agus une notoriété internationale, car ce roman a été traduit dans 26 pays. La Sardaigne, son île, haute en couleur et en saveurs, a toujours le beau rôle. De ses romans, elle dit «  C’est ainsi que je vois la vie, misérable et merveilleuse». De sa famille, elle dit qu’ils sont « sardes depuis le paléolithique ».

J »ai passé, encore une fois  un bon moment en me promenant en Sardaigne tout en partageant la vie des personnages touchants d’Agus.